NSS FRANCE
La Lettre
 

La lettre N°8 - Avril 2004
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Sommaire
 
 
 
 
 
Trop souvent, il fut reproché à la National Space Society France d’être parfois trop critique envers l’agence spatiale européenne et pas assez constructif à son égard. Nous souhaitons, ici, éclairer notre position à son sujet.
 
 
 
 
 
Le 8 août 1789 dans un sursaut de lucidité dramatique, le Roi de France convoquait les trois ordres sociaux de la France de l’Ancien Régime ; Le Tiers-état, le clergé,et la noblesse ; pour former une assemblée de délégués venant de tout le pays et imposerait des réformes.
 
 
 
 
L’association citoyenne, déclarée loi 1901, National Space Society France s’associe aux objections de ces derniers temps à propos de la recherche en France. Nous sommes une association qui promouvons une politique spatiale habitée ambitieuse pour l’Europe et la France. La Recherche fondamentale ne nous concernant pas directement, nous n’avions pas pris parti dans les débats faisant rage ces dernières semaines. Il est grand temps de réagir...
 
 
 
   
 
Avec la dilution de l'ambitieux programme spatial européen concocté à La Haye en Novembre 1987 et qui a fait litière du programme d'avion spatial Hermes et du module autonome MTFF, la possibilité pour l'Europe de disposer d'une capacité propre de lancement habité s'est réduite comme neige au Soleil en rendant les Européens très dépendants des vols de la navette spatiale américaine et des vols russes Soyouz...
 
     
 
 
 
A la suite de l’intervention du Président Bush, le 14 Janvier 2004, sur la stratégie adoptée pour la politique spatiale américaine, parmi les multiples remarques, nous entendîmes de nombreuses critiques sur l’utilité d’un retour de l’homme sur la Lune. Faisons le point bibliographique sur ce sujet.
 
     
   
 
 
     
   
 
Que penser de la décision de ne pas réaliser un vol de navette pour une dernière maintenance au bénéfice du télescope spatial ? Nous ferons simplement quelques remarques sur cette question.
 
 
 

 
 
  • Pourquoi l'ESA doit être soutenue ? - Nicolas Turcat.

Trop souvent, il fut reproché à la National Space Society France d’être parfois trop critique envers l’agence spatiale européenne et pas assez constructif à son égard. Nous souhaitons, ici, éclairer notre position à son sujet.

Il y a de multiples raisons pour soutenir l’agence, dont voici les deux principales : l’une structurelle et l’autre plus politique et stratégique. L’ESA a en effet déjà connu de nombreux succès dans le passé et continue aujourd’hui avec l’orbiter de Mars Express, les missions habitées sur l’ISS qui furent toutes des succès, ou encore Rosetta. L’ESA a su dans les années 80s construire une politique spatiale variée et ambitieuse ; tous les travaux autour de la future station spatiale internationale, Spacelab, Ariane, Euro-Mir Missions ou encore Hermès en sont de brillants exemples. L’Europe savait conjuguer destin politique et scientifique avec ambitions économiques. Très axée sur une politique scientifique forte, l’ESA a trouvé la force nécessaire pour effectuer des missions habitées dans un contexte pourtant pas très favorable à ce genre de programme – pensons à la période post-86 puis après Hermès en 1992 – Beaucoup de spécialistes considèrent l’ESA comme une des agences spatiales fonctionnant le mieux, c'est-à-dire très créatrice avec peu de moyens. Selon certaines sources, elle semble bien gérée. Rappelons que le financement de l’ESA est 10 fois inférieur à celui de sa sœur américaine. Il est indéniable que l’agence européenne est dotée d’une formidable capacité à accomplir des missions complexes avec très peu de moyens. Il suffit de contempler les dernières missions scientifiques, les programmes martiens ou les futurs missions lunaires. Notons par exemple que l’ESA annonça le programme Aurora, il y a deux ans de façon un peu étonnante mais que de très nombreux travaux pratiques en découlèrent (Cf. site Internet de l’ESTEC). Aurora était alors le seul programme post-ISS au monde à clairement annoncer les ambitions d’une agence spatiale. Ce programme faisait alors référence en matière de détermination programmatique de la part de l’Europe. Et même si Aurora se contentait de n’être que trop souvent des travaux papiers, il y a une volonté clairement énoncée de poursuivre l’exploration du système solaire. Aurora est toujours un programme d’actualité qui ne demande qu’à être boosté, peut être revisité dans certaines phases, voir mieux justifié, mais ce programme doit devenir un fondement de l’existence future de l’agence.
L’ESA fit naître Aurora mais lia également les différents acteurs de l’aérospatiale autour de ce projet. Il est en effet remarquable pour l’ESA d’essayer d’associer des écoles d’ingénieurs ou des universités à travers des programmes scientifiques spatiaux ou encore à Aurora. Il suffit pour cela de voir les événements et conférences crées pour le monde de l’éducation sur le site Internet de l’agence (ici). Il y a une réelle volonté de faire comprendre les travaux de l’ESA – un effort de vulgarisation est effectué régulièrement. Notons que la même politique est appliquée aux liens entre l’ESA et les industriels, c'est-à-dire les retombées directes des programmes spatiaux (spin-offs). Les travaux du COSPAR sont un exemple de ce que peut produire le student participation program de l’agence européenne. Cette dernière sur ce point est une pionnière en Europe (y compris face à d’autres institutions du même ordre) et particulièrement active à lier ses activités aux réalités de l’Union Européenne. Remarquons ici, la pression mise par l’ESA sur la Commission Européenne (et en particulier sur M. Busquin) afin d’inscrire une politique spatiale à l’ordre du jour dans la future Europe politique (White Paper). On ne peut nier non plus que l’ESA n’a pas effectué un rôle de convergence des connaissances scientifiques européennes, pour mieux faire comprendre les enjeux de l’Espace. L’ESA n’est jamais très loin de chaque colloque ou réunion scientifique en Europe. L’agence reflète donc relativement les volontés scientifiques européennes mais peut faire mieux… Il ne s’agit pourtant que des raisons structurelles de notre soutien, au delà, il y a des raisons plus politiques ou stratégiques.

Nous venons de le dire mais il s’agit de le démontrer du point de vue d’un intérêt politique : L’ESA peut paraître comme la convergence des forces vives spatiales européennes. Au-delà de cet aspect formel, il y a une réelle capacité pour l’agence de faire cohabiter des forces parfois antagonistes. Tous les programmes ESA sont marqués par une concurrence féroce entre les industriels européens, l’agence a souvent su maîtriser ces rivalités pour en faire une force créatrice qui permit de lancer des programmes relativement complexes. Si la NSS France, il y a plus d’un an s’était montrée circonspecte au regard du transfert de pouvoir des agences nationales vers l’ESA, nous redoutions alors que l’agence spatiale européenne ne devienne qu’un ‘’grand machin’’ qui ne puisse pas comprendre les réalités politiques du développement des activités de l’Homme dans l’espace. Entre temps, en France et en Europe, un réveil politique semble, peu à peu, se profiler. La meilleure preuve en fut les articles et déclarations des décideurs politiques ces derniers temps (grands programmes de J. Chirac ou de R. Prodi), ou encore les annonces par les commissaires européens d’aller dans cette direction : comme Erkki Liikanen commissaire européen chargé des entreprises qui annonçait dans le quotidien Le Monde que les services ne tireront jamais l’économie et seule une politique industrielle fondée sur l’innovation permettrait cela. Jean-Jacques Dordain ou M. Busquin lors de l’annonce par M. Bush se montrèrent favorables à un revirement politique du débat spatial. L’ESA peut donc devenir cet instrument politique fondamental dans la construction européenne. Il y a deux cent ans, un Etat se fondait, en partie, sur son armée comme instrument de pouvoir et souvent comme prestige national.
En 2004, la situation est tout autre. L’ESA peut devenir cet instrument de prestige, et particulièrement le symbole européen de notre volonté commune à bâtir, ensemble, une entité propre. L’ESA est parfaite pour ce rôle puisqu’elle en est presque déjà consciente. Tout comme la CECA ou l’Euratom (CEEA) furent des acteurs efficaces entre les années 50s et 60s dans les fondements de la Communauté Européenne, l’agence spatiale européenne peut devenir un pilier des projets unificateurs qui fixeront le cadre de la future Europe politique. L’Espace est un enjeu politique et stratégique. Politique car les retombées économiques, industrielles, et scientifiques seront nombreuses pour l’Europe. Stratégique car l’Europe se bâtit, dans le même temps, une identité forte autour de projets convaincants et suffisamment innovants pour transformer l’Union Européenne en une vraie puissance économique, diplomatique, militaire, ou scientifique. L’ESA possède donc tous les atouts pour devenir ce pilier politique : le fond et la forme. Nous avons vu la forme avec les raisons structurelles de notre soutien, le fond tient en quatre mots : proposer une politique spatiale et industrielle ambitieuse. Il s’agit maintenant de s’atteler à la tache pour faire de l’Europe une vraie puissance spatiale.
Enfin fermons le débat sur ce dernier point : l’ESA est la seule structure capable d’accomplir cette politique spatiale ambitieuse. En effet, il n’est pas courant d’entendre sur ce continent des critiques de fond à l’encontre d’une agence spatiale. Aux Etats-Unis, il est courant de voir des critiques concernant le monopole de la conquête spatiale par la NASA. Certains vont même jusqu’à mettre en doute l’utilité même de cette agence au profit de l’industrie privée. Encore une fois, nous pensons que seule une agence peut être le symbole légal de la volonté et de l’ambition d’une entité politique. L’industrie privée n’a pas à répondre de ces actes et décisions face au peuple. Si un industriel européen souhaitait se lancer seul dans le développement d’un véhicule habité, sans que l’ESA ne demande rien, elle le pourrait faire techniquement. Rien ne l’en empêcherait. Cependant seule l’ESA représente l’expression de nos volontés, puisque nous élisons régulièrement un parlementaire européen ; que ce dernier est en relation avec la Commission Européenne, et avec la future Constitution européenne, l’interface Citoyen/Etat européen devra être encore accru. L’agence spatiale européenne est aussi en connexion directe avec la Commission Européenne – l’exécutif de notre entité continentale – L’agence représente donc indirectement (et même si le contrôle de l’un vers l’autre reste à améliorer – Check and Balance Theory) les volontés de l’Europe. Enfin le jour où il sera question de lancer un programme spatial ambitieux, il faudra irrémédiablement passer par l’ESA qui est, et restera, la structure adéquate et seule capable de conjuguer les efforts des forces vives de l’Europe. Nous irons dans l’Espace pour bâtir une politique industrielle européenne ambitieuse et réellement innovante ; l’ESA sera alors l’instrument et le cadre parfait pour exécuter ces volontés politiques. L’ESA est donc vouée à un destin hautement politique dans l’avenir de la construction européenne : c’est la raison fondamentale de notre soutien à l’agence spatiale européenne.

Nous soutenons donc l’ESA mais ne restons pas les bras croisés à contempler béatement les réalisations de cette dernière institution. Nous avons critiqué l’ESA pour essayer de pousser le débat un peu plus loin que le cercle restreint des acteurs de l’espace en France et en Europe. Toutes nos critiques ont été justifiées et argumentées, nous avons parfois dit, un peu abruptement, ce que nous pensions et nous ne croyions pas que ce soit négatif. Notre ton peut quelquefois un peu nuire au discours mais l’apathie occasionnellement montrée par nos institutions est affolante. Nous essayons d’avoir une vraie démarche constructive et évoluons tous les jours dans notre réflexion. L’association fut fondée par des jeunes étudiants qui n’ont rien à voir avec l’Espace, et qui pensent qu’une politique industrielle basée sur un programme spatial habité ambitieux pour l’Europe sera positif et pourra apporter une solution politique aux affres de notre temps. Nous essayons de faire progresser notre pensée afin de rendre le débat plus incisif et surtout plus convainquant. Nous serons donc en perpétuelle évolution. En tant qu’association citoyenne, nous nous permettons donc d’énoncer notre point de vue, n’en déplaise à certains. L’ESA doit donc continuer d’être critiquée, ses décisions ou prises de position toujours soumises à l’examen réfléchi de nos concitoyens : elle en ressortira d’autant plus raffermie. Soyons exigeants avec le seul instrument que nous possédons pour accomplir notre dessein – un développement des activités de l’Homme dans l’Espace – le peuple souverain peut donc exiger le meilleur de cette agence. Enfin nous ne nous prétendons pas être les représentants officiels de la population mais souhaitons simplement que l’agence spatiale européenne fasse vraiment progresser son discours dans les intérêts de la construction européenne. Toutes les espérances de la jeunesse européenne sont entre ses mains.

Des meilleurs nous exigeons le meilleur.


Nicolas Turcat – Président de la National Space Society France – 29/2/4

 
 
 
 
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  • Des Etats-Généraux pour une politique spatiale ambitieuse ! - Nicolas Turcat.
Le 8 août 1789 dans un sursaut de lucidité dramatique, le Roi de France convoquait les trois ordres sociaux de la France de l’Ancien Régime ; Le Tiers-état, le clergé,et la noblesse ; pour former une assemblée de délégués venant de tout le pays et imposerait des réformes. Dernière solution proposée par Loménie de Brienne avant de démissionner, contrôleur général des Finances, sans expérience et sans imagination, la dernière convocation des Etats-Généraux datait de 1614. Grande réunion censée représenter les forces vives du royaume, elle permettait de faire voter des impôts exceptionnels. Dans le contexte de 1789, elle avait été convoquée pour faire des réformes financières mais aussi sociales fondamentales (un impôt pour la noblesse devait y être abordé). Le 5 mai 1789 s’ouvrait, donc, les Etats-Généraux dans l'hôtel des Menus Plaisirs, à Versailles, faisant suite à d’impatients et vigoureux débats dans les provinces de France, ainsi qu’à de mauvaises récoltes et un hiver très dur. Les discours inconsistants de Louis XVI et de son ministre Necker déçoivent les députés de tous bords. "La bataille est engagée" écrira le soir même un député du Tiers, non contre le Roi, mais avec le Roi pour sauver le royaume. Le 17 juin 1789 est entamée une étape supplémentaire avec la déclaration du Tiers-état, aidé de quelques membres du clergé, de se constituer en assemblée nationale. Le 20 juin, les députés dissidents se réunissent dans la salle du jeu de paume à Versailles pour se promettre de rester solidaire jusqu’à ce que le royaume se dote d’une constitution. Trois jours plus tard, et grâce à la fougue d’orateurs comme Bailly, Mirabeau, l’abbé Grégoire ou Sieyès, le Roi cède en autorisant l'ensemble des députés à rejoindre l'assemblée nationale. L'absolutisme royal est discrédité. La Révolution peut commencer.

Dans une communication précédente, l’association, déclarée loi 1901, National Space Society France a déjà appelé à la formation, sous l’égide des agences spatiales et institutions européennes, d’Etats-Généraux pour une politique spatiale ambitieuse par l’Homme et pour l‘Homme. L’esprit constructif et en rupture avec le passé des Etats-Généraux de 1789 peut nous servir pour mieux comprendre notre démarche. Nous ne disons pas que la situation est similaire mais l’idée régnante, qui était de faire avancer le royaume dans des temps nouveaux doit servir d’exemple pour tous. Cette volonté créatrice d’avenir est dans l’esprit de tous avant les Etats-Généraux – il suffit pour cela de lire la candeur, l’espoir et l’optimisme mis dans la rédaction des cahiers de doléances entre l’automne 1788 et le printemps 1789. Notre république découle directement de cet événement. La constitution de l’assemblée nationale présidée par Bailly est la première étape vers la Révolution française, qui malgré tout, fut une avancée majeure pour notre pays. Cette étape le fit entrer de plein pied dans le monde moderne et générateur d’idéaux égalitaires, démocratiques et fraternels. L’Europe politique de notre temps est à l’orée de sa constitution. Le temps est venu de bâtir et d’unifier notre continent sur de solides bases. Ces fondations peuvent être constituées de grands projets porteurs d’avenir pour la Société européenne, ainsi que des projets stratégiques qui établiront l’Europe dans le cercle des nations puissantes, ouvertes et crédibles. Une politique spatiale habitée ambitieuse, pour ces raisons, peut faire partie de ces grands projets. Nous pensons que l’espace habité est le seul secteur d’activité qui soit aussi porteur d’avenir économiquement, politiquement et socialement. Un développement des activités humaines de l’Espace permettra de créer de nouveaux potentiels d’activités, vecteurs fondamentaux pour l’ouverture de notre économie à de nouvelles sphères du même ordre. Le temps n’est plus à d’interminables partages mais à créer une donne encore plus grande. Une politique spatiale habitée ambitieuse peut nous permettre d’atteindre cet incorruptible but qui est d’élever notre société afin que tous puissent y participer en toute égalité.

Mais la réalité actuelle est tout autre, nous ne reviendrons pas sur le sombre tableau que nous offre tous les jours notre continent. Comme étudiant de 24 ans, j’espère mieux pour les miens et mes concitoyens européens. Nous connaissons l’inertie de nos décideurs et nos institutions. Ces dernières n’ont plus de sens, et beaucoup d’entre vous ne se reconnaissent plus en eux. Incapables de proposer quelque chose de novateur, un futur décent ou un projet d’avenir enthousiasmant, acculés à un système qu’ils ont eux-mêmes créé et qui les détruit tous les jours, acteurs parfois involontaires mais serviles d’une hiérarchie, nous connaissons les résultats de leurs politiques. Pourtant le temps doit être à l’optimisme, c’est dans les situations les plus sombres qu’ont su surgir les solutions et les espérances les plus folles pour donner lieu à des propositions qui éclairèrent l’avenir d’une façon novatrice. L’Homme ne peut s’arrêter de progresser, il s’agit maintenant de passer à l’étape suivante de manière volontaire, réaliste mais ambitieuse. C’est la raison pour laquelle nous appelons tous les acteurs de notre société concernés par l’Espace à participer à la formation d’assises générales de l’Espace ou plus simplement intitulées : Etats-Généraux pour une politique spatiale ambitieuse, où pourrait être défini un leadership européen dans le domaine et où des propositions concrètes et réalisables politiquement pourraient être proposées. Le court, moyen et long terme devront être débattus, la politique spatiale habitée, remise en cause et décidée de façon réelle, la problématique autour des applications fondamentales ainsi que de la recherche et développement débloquée. Ce grand forum de discussion et de décision devrait prendre place dans les plus bref délais. Dans un pays ou un continent qui se targue d’être à l’écoute de toutes les tendances et opinions, les hommes politiques devraient enfin comprendre la nécessité de redéfinir la problématique de notre société. Comment faire pour que tous puissent être partie prenante de la société que nous bâtissons ? La solution viendra, en majeure partie, en s’engageant dans une politique spatiale habitée ambitieuse, une politique de recherches fondamentales, ou de développement du secteur de l’innovation réelle (R&D, synergie publique-privée, etc.), tout en menant une politique sociale juste, une politique qui mettra l’éducation nationale comme priorité nationale ou en poussant au développement du tiers-monde. Ce ne sont ici que quelques idées pouvant êtres débattues mais montrant à quel point l’Espace concerne le monde politique. Trop souvent l’espace habité fut montré comme le rejeton de la Real Politik de certains, l’impérialisme ou l’hégémonisme d’autres, il s’agit de bâtir une nouvelle problématique autour de la politique spatiale habitée et de voir plus loin que le bout de nos finances. Le travail est énorme.

Seule la réunion de ces Etats-Généraux pourra nous éclairer sur l’état de notre continent et statufier les volontés de nos décideurs, c’est aussi une opportunité pour tous de faire émerger des propositions. Le débat se devra d’être des plus constructif et novateur. La NSS France a vocation de permettre aux idées de s’exprimer. Nous l’avons fait par le passé avec nos 15 propositions sur 5 ans, ou l’Initiative Spatiale Européenne, nous le refaisons en proposant ces Etats-Généraux sous l’égide de nos institutions européennes tutélaires. Comme lors du serment du Jeu de paume le 20 juin 1789, les députés jurèrent de ne jamais se séparer et de se rassembler partout où les circonstances l’exigeront jusqu’à ce que la Constitution du royaume soit établie et affermie, nous ne nous séparerons pas avant d’avoir fait des propositions concrètes, raisonnables mais ambitieuses. Nous aurons alors pavé la route et pris l’initiative d’espérer un avenir meilleur. Toutes ces espérances, je le souhaite de tout cœur, ne seront pas vaines. Le sujet mérite d’être débattu. Il s’agit d’engager l’Europe dans une ère nouvelle.


Nicolas Turcat
Président de la National Space Society France

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  • Pour la Recherche française : une politique spatiale européenne forte - Nicolas Turcat.
 
L’association citoyenne, déclarée loi 1901, National Space Society France s’associe aux objections de ces derniers temps à propos de la recherche en France. Nous sommes une association qui promouvons une politique spatiale habitée ambitieuse pour l’Europe et la France. La Recherche fondamentale ne nous concernant pas directement, nous n’avions pas pris parti dans les débats faisant rage ces dernières semaines. Le président de l’association, Nicolas Turcat, à titre personnel, avait signé dès le 24 janvier 2004 la pétition circulant sur Internet, puis se tenait au courant des développements jusqu’au 19 mars 2004. Sans pour autant dire que nous partageons la totalité des opinions du collectif ‘’Sauvons la Recherche’’ (avec qui nous sommes en contact), nous souhaitons nous inscrire dans une logique solidaire pour dénoncer les conditions de plus en plus précaires de la Recherche en France. Il est encore une fois temps d’inverser la tendance et de se donner un nouvel horizon. Un développement de l’Homme dans l’Espace effectué de manière ambitieuse et concrète requièrerait de nombreuses recherches fondamentales ou appliquées. Le sujet est donc profondément lié à nos souhaits. Il est aussi temps pour nous de réagir sur ce domaine.

Ne pouvant pas nous exprimer sur l’intégralité des aspects du problème, nous souhaitons nous prononcer sur trois facettes de la recherche française : une recherche fondamentale et publique, la recherche comme un moyen et non une fin, et enfin sa relation avec l’espace.

Concrètement, aux cours des débats de ces dernières semaines, les discussions portèrent autant sur les interfaces entre recherche privée souvent appelée recherche appliquée et recherche fondamentale dite publique, que sur le nombre de postes à pourvoir. Le premier sujet évoqué est d’autant plus important qu’il deviendra une corrélation importante le jour où sera lancée une politique spatiale ambitieuse. Les relations entre industriels américains (que cela soit le complexe militaro-industriel ou l’industrie spatiale US) et la NASA pendant la période d’Apollo ou du Shuttle ont déjà été étudiées et peuvent servir d’exemples pour l’exploration de nouvelles pistes pour ces interfaces qui sont à redéfinir en France et en Europe. Si tout le monde s’accorde sur le fait que la Recherche fondamentale soit bénéfique à la recherche appliquée, voir liée par essence à cette dernière, les relations et la définition de ces dernières sont, à l’heure actuelle, remises en cause par un certain nombre de personnes dont le gouvernement actuel – ainsi que peut-être le prochain avec M. François d’Aubert - se fait, malencontreusement le porte parole. La tentation de privatiser la recherche fondamentale doit être ici dénoncée et combattue. Il en va de l’avenir d’une politique spatiale ambitieuse. En effet, dans le contexte actuel, une entreprise privée faisant des recherches, orientera ces dernières vers des produits qui rapporteront, ou, moins grave mais tout aussi biaisée, cette entreprise orientera ces recherche vers des secteurs dits ‘’rentables’’ sur le court ou moyen terme. Or le problème actuel est que l’espace habité n’est pas lucratif. Donc aucun industriel européen n’a d’intérêt à investir dans des recherches concernant ces projets spatiaux. Pire, la recherche fondamentale risque de n’être jamais rentable et c’est tant mieux, ce n’est d’ailleurs pas son rôle. Il est pourtant évident qu’il faille améliorer l’interface entre privé et public, mais la recherche fondamentale doit être enfin financée et comprise comme un vecteur de développement sur le long terme. Nous sommes ici au cœur de la création de potentiels d’activités : processus que notre association entend bien remettre au cœur des débats entourant le spatial. La recherche publique doit donc rester une prérogative du domaine d’Etat car lui seul est capable d’assumer cette non-rentabilité financière, cette éthique nécessaire, et cet effort quasi économique au bénéfice de ses citoyens. La recherche fondamentale devrait être classée parmi les actions pour le bien public.
Il y a des dizaines de secteurs de recherche en France qui ne rapporteront peut–être que très peu mais ceux-ci doivent être conservés, et même réaffirmés au nom de la conservation des compétences pour notre futur. La recherche privée ou appliquée doit être dans le même boosté de façon incitative (la NSS France avait déjà proposé l’idée du Zéro taxe, Zéro Gravité). Il fut récemment question de concevoir une agence nationale pour la science (un peu à l’image de la NSF américaine), nous ne sommes pas opposer à la création de cette dernière. En effet, si celle-ci s’avère bien gérée et suffisamment décisionnaire pour pouvoir influer sur la politique scientifique du pays, nous sommes alors partisans de cette solution. Cependant il ne s’agit pas de créer un monstre administratif de consensus et qui se révèle incapable d’aider quelque projet que ce soit. Une petite équipe de choc et des Hommes d’avenir devront être mis à la tête de cette agence. Cette agence pourrait, en plus de gérer les desseins scientifiques du pays, servir de concentrateur d’idées et de projets pour l’industrie (tout en évitant la surprogrammation parfois endémique à ce genre d’administration), finalement elle devra faire le lien éminent entre privé et public. Enfin cette institution devra gérer l’européanisation des projets scientifiques qui deviendra une tendance de plus en plus d’actualité ; particulièrement dans le domaine spatial. L’interface entre public et privé devra de toute façon évoluer au cours des années à venir, ce qui est d’autant plus vrai pour quant aux intentions européennes. Pour conclure notons que nous soutenons la recherche fondamentale comme prérogative vitale de l’Etat. De coûteuses recherches, pas forcement rentables immédiatement, doivent continuer d’être exercées afin de déboucher, sur des technologies ou découvertes qui changeront la donne plus tard. Il n’est pas seulement question de vulgaires retombées mais plus de percées technologiques stratégiques pour l’Europe de demain.

La Recherche ne doit pas cependant qu’être perçue sous la lorgnette de la lutte entre privé/public, financement ou pas, ou encore postes accrédités ou contractants. Par ailleurs, évitons toutes dérives strictement corporatistes inhérentes, parfois, à ce genre de mouvements de contestations. Il s’agit de redéfinir la recherche d’un point de vue plus politique ou programmatique. Les hommes politiques, y compris à travers les différents comités consultatifs, ne peuvent que mal juger la crédibilité réelle de telles ou telles recherches. Il en est de même pour les citoyens. C’est pourquoi nous sommes en faveur, en plus des recherches fondamentales déjà menées, de regrouper ces dernières sous des projets plus ou moins unificateurs. Que ces projets soient médicaux (SIDA, Cancer …), pharmaceutiques, industriels, énergétiques, ou spatiaux ; il va s’agir de clairement repositionner la recherche comme un moyen et non une fin. S’il y a eu de l’Art pour l’Art, il ne peut y avoir de Recherche pour la Recherche – les ressources et les responsabilités envers nos concitoyens sont trop grandes. Il est clair que certaines recherches ne rentreront pas dans le cadre des projets énoncés, et que celles-ci doivent survivre et être bien au contraire être encouragées. Il faudra donc nommer ces projets, leur donner une feuille de route et leur permettre toute la flexibilité à laquelle la science a droit. Il n’est pas question de mettre une pression injustifiée aux chercheurs mais de réorganiser certaines modalités de la recherche afin de mieux faire comprendre l’action d’un Etat dans les domaines décrits. L’Etat, ou mieux, la Commission Européenne va devoir prendre des décisions importantes et développer des projets porteurs d’avenir afin de pouvoir défricher des sentiers sur lesquels pourront s’engouffrer d’autres recherches. Enfin quelques projets réellement avancés (peut être trop ?) devront être redéfini afin de tirer en avant la recherche. Il faudra dans le même temps lutter contre la surprogrammation, ou l’excès d’exotisme et concentrer ces forces sur des projets réellement créateurs de nouveaux potentiels d’activités. L’Homme politique dans sa dimension sociétale prend ici toute l’ampleur de sa tache. L’innovation sera d’ailleurs au cœur du débat. L’Innovation réelle et le Progrès humaniste devront être les lignes directrices de ces projets qui restent, toujours à ce jour, à définir et surtout à concrétiser politiquement. Augmenter les budgets consacrés à la recherche est évident mais pas suffisant, il s’agit maintenant de définir nos ambitions futures pour l’Europe. M. Busquin avait annoncé dans le Monde courant février que le problème français était de transformer la science en valeur économique. Ce n’est pourtant pas le rôle de la Recherche ! Nous l’avons vu, il est évident qu’il faille améliorer les interfaces entre le privé et la recherche publique. Parallèlement, M. Busquin sur la radio Europe 1 dans la semaine du 15 mars déclare que la France est le seul pays européen à ne pas avoir augmenter ses budgets de recherches. Le commissaire européen semble démentir ici la fameuse polémique des préalables tendue par le gouvernement (qui consiste à dire qu’avant de financer, il faut réorganiser). Il est évident qu’il faudra faire les deux dans le même temps. Mais comme disait M. Cohen, économiste sur la radio BFM, fin février, il ne faut pas affamer la troupe pour qu’elle se batte mieux. Comme il est tout à fait illusoire de vouloir calquer des modèles outre-atlantiques, qui sont toujours sujets à débats là-bas, il s’agira pourtant de se moderniser un peu à la manière de certaines universités américaines. Aujourd’hui, le tableau de la Recherche peut paraître sombre mais la fraîcheur et la noirceur du bout de la nuit, ne doivent pas nous faire oublier que l’aube sera bientôt là. En réalité, le problème n’est pas tellement de financer la recherche, nous sommes tous d’accords avec ce postulat, mais de savoir que faire avec ce formidable instrument qu’est la Recherche française. Le défi du XXIème siècle sera de redonner une ambition européenne à notre Recherche.

Nous l’avons déjà soutenu, cette ambition retrouvée pourra se faire à travers de nouveaux potentiels d’activités comme une politique spatiale habitée. Nous l’avons vu à travers les exemples que nous avons évoqués ces derniers temps : la Recherche sera un pilier de nos prochaines réussites spatiales au XXIème siècle. Une politique spatiale ambitieuse ne pourra se passer de cette composante fondamentale. L’espace n’en est qu’à ces prémices et reste un champ vierge de toute découverte où tout reste à accomplir. Le travail de R&D pour les industriels, de recherches fondamentales pour les agences spécialisées et les maîtrises d’œuvres des agences spatiales seront les travaux de demain à accomplir en même temps qu’une grande Initiative Spatiale Européenne. Dans certains milieux scientifiques et associatifs, ces derniers temps, il est de bon ton de dire que l’espace (comme le nucléaire, ou l’aéronautique) fut un programme favori. Certains parlèrent même d’enfant chéri de la France. Nous mettons en garde, les auteurs de ces paroles, contre la volonté de monter les uns contre les autres. La réalité est tout autre : la France n’a quasiment plus de prérogatives spatiales nationales habitées (le CNES est réduit au strict minimum), le nucléaire qui est tant sujet à débat (ITER) et qui pourtant mériterait tellement plus ! Ou l’aéronautique qui n’évolue plus depuis plus de 30 ans ! Nos trois enfants chéris semblent bien mal en point et mériteraient mieux. L’espace habité concerne désormais l’ESA et l’Europe. C’est dans cette optique que nous demandons à ce que l’ESA soit dopée de façon concrète et immédiate. C’est toujours dans cette perspective que nous soutenons l’agence spatiale européenne. Le débat sur la recherche semble concerner les milieux français, mais croyiez-nous, la situation chez nos voisins européens n’est guère plus reluisante… L’Espace est un projet majeur concret et unificateur autour duquel pourrait se définir l’Union Européenne. L’espace représente un sommet à atteindre, et par son aspect inatteignable, évoque nos ambitions pour l’Europe de demain : un continent uni autour de projets scientifiques, industriels et politiques d’importances et suffisamment lointains pour faire progresser l’Innovation mais assez proche pour en faire un projet social. Il n’est plus le temps de revenir en arrière, bien au contraire. C’est dans cette logique que nous avons sollicité des Etats-Généraux pour une politique spatiale, il y a plus de deux mois. C’est aussi dans ce même sens que nous demandons à participer aux assises sur la Recherche tenues par le gouvernement ainsi qu’aux Etats Généraux pour la Recherche (organisés par le collectif Sauvons la Recherche). Nous pensons qu’il est temps de prendre conscience de la nécessité absolue de bâtir une politique scientifique à travers des projets unificateurs. L’espace est un formidable potentiel d’activité pour toute notre Société. L’Europe de demain se bâtira aussi dans nos laboratoires. La France peut jouer ce rôle de pionnier dans le domaine.

Nicolas Turcat – le 27/03/04

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  • Ariane V et le vol habité - Philippe Jamet.
 
 
Avec la dilution de l'ambitieux programme spatial européen concocté à La Haye en Novembre 1987 et qui a fait litière du programme d'avion spatial Hermes et du module autonome MTFF, la possibilité pour l'Europe de disposer d'une capacité propre de lancement habité s'est réduite comme neige au Soleil en rendant les Européens très dépendants des vols de la navette spatiale américaine et des vols russes Soyouz. En dépit de ce coup de poignard qui a démobilisé une équipe composée de 1600 ingénieurs et techniciens de haut niveau pour ce qui concerne l'avion spatial Hermes, l'Europe s'est dotée d'un excellent corps d'astronautes qui ont participé à des missions aussi bien sur le Shuttle que sur le Soyouz et la station MIR (missions Euromir 94 et 95) ou encore des vols Soyouz dits ''taxis'' vers la station ISS comme ce fut le cas récemment pour la mission Cervantès qui emportait l'astronaute espagnol de l’ESA Pedro Duque. En 2010, après 30 ans de service, la navette spatiale américaine sera retirée de la scène pour être remplacée par un Orbital Space Plane lancé par une fusée classique (Atlas-5 ou Delta-4) et qui servira à la fois de véhicule de transport (CTV) et de secours (CRV) en deux variantes possibles: soit une capsule (solution Boeing), soit un mini-avion spatial à corps portant (solution Lockheed-Martin) – Ndlr : ces propositions industrielles semblent avoir déjà évoluées. Du coté russe il n'est pas exclu que l'on construise de nouveaux Soyouz améliorés (malgré une réticence des milieux industriels américains et des pouvoirs publics hostiles à des transferts de technologie) mais, actuellement, un autre projet semble émerger du coté de la Russie, à savoir le concept de vaisseau habité KLIPPER proposé par la firme RKK Energya. Klipper serait un vaisseau de la classe 12-14 tonnes architecturé sur une double structure: un compartiment appareillages et instruments et une capsule réutilisable capable de transporter 6 personnes (2 copilotes et 4 expérimentateurs) et capable de déports latéraux permettant de faire varier sa trajectoire pour atterrir à un point voulu sur le sol russe. Pour ce qui concerne l'Europe, qui a déjà déposé les armes avec Hermes et n'a pas soutenu avec suffisamment de conviction les projets CTV-CRV, la situation est inquiétante car il n'est pas interdit de penser quelle solution pourra permettre à l'Europe d'envoyer ses propres astronautes dans l'espace. Le manque de vision des politiques et le manque de compréhension des implications profondes de la conquête de l'espace chez nos ''décideurs'' est affligeant ; Revenons aux années 1985-1987, ou plus précisément au moment où la France a proposé (1985) le concept d'avion spatial Hermes à ses partenaires de l'ESA. L'émergence du projet est due à 3 faits parfaitement perçus par les ingénieurs du CNES:

1) la disponibilité à venir du lanceur Ariane 5P prévu au départ pour la mise en orbi-te des satellites lourds commerciaux et de charges utiles automatiques mais apte également à la mise en orbite basse d'un mini-avion spatial intégré.

2) la prise de conscience relativement ancienne par les ingénieurs français de la nécessité d'une capacité autonome d'intervention humaine en orbite, certains domaines comme les expériences en microgravité impliquant la mise en orbite de systèmes d'une complexité croissante, donc coûteux, et dont il faut assurer une durée de vie de plus en plus grande (maintenance, réparation). Notons à ce propos combien cette justification était empreinte de lucidité:à l'époque où ses promoteurs tentaient d'imposer le concept Hermes, fleurissaient au sein du CNES de multiples projets d'usines automatiques orbitales (Solaris, Minos) et que l'on comptait installer et desservir par des engins eux aussi totalement automatisés. Certains en France espéraient par ce biais entamer le monopole américain et soviétique des recherches sur la microgravité et court-circuiter les étapes traditionnelles d'intervention orbitale en croyant bien à tort pouvoir faire l'impasse sur l'homme dans l'espace.
Les expériences américaines et soviétiques ont démontré que le robot était effectivement supérieur à l'homme dans l'espace lorsque l'acquisition du savoir-faire était assurée et que les situations répétitives prenaient progressivement le dessus. Toutefois ces mêmes expériences ont également démontré de la façon la plus éclatante qui soit que les robots présentent le grave défaut de manquer de capacité de réponse instantanée aux situations imprévues, et qu'il était totalement impossible de se passer de la présence de l'homme en orbite dans le cas de missions complexes, non répétitives et où surviennent des incidents. Dans l'état actuel du développement du système technique, nous savons parfaitement qu'il est absolument nécessaire de disposer d'un corps d'astronautes pour assurer la récupération et la réparation de satellites en orbite, la desserte et la maintenance de laboratoires, de grands observatoires astronomiques orbitaux tels que le Space Télescope ou bien encore pour modifier la configuration d'infrastructures orbitales. A propos des programmes Ariane 5 et Hermes, en 1988, Jörg Feustel-Büechl, directeur des systèmes de transport spatial à l'ESA, écrivait dans le document ESA-BR-42 : ''Quant à ceux qui veillent à la sauvegarde de la dynastie Ariane, leur pensée va de l'avant et ils travaillent déjà sur Ariane 5 qui sera capable de placer sur orbite, dans des conditions plus économiques, les satellites des dernières années de ce siècle et des premières années du suivant. L'Europe ne borne pas là ses ambitions car, en mettant au point Hermes, avion spatial de conception et de réalisation européenne, elle rejoindra les puissances maîtrisant les -techniques des vols habités, ceux qui domineront l'exploitation et l'exploration de l'espace au vingt-et-unième siècle''

3) de préparer l'Europe aux prochaines étapes de la conquête spatiale (la Lune puis Mars) et en asseyant sa crédibilité pour qu'elle soit considérée dans cette perspective comme un partenaire majeur et incontournable par les deux principales puissances spatiales de l'époque. Ce fait n'a pas été assez souligné au niveau de la communication par les responsables de l’ESA et des industriels au prix de ce que nous pensons être une certaine forme de peur de s'affirmer pour un grand programme spatial à cause des résistances et de l'incompréhension des décideurs et de l'ignorance de l'opinion publique à laquelle les agences spatiales ne savent pas s'adresser. Le record d'incommunicabilité est toutefois détenu par la NASA puisque 61 % des Américains seraient hostiles à un retour sur la Lune. Cette option de participation à un programme lunaire était toutefois défendue par Jean-Charles Poggi (directeur de la division des systèmes stratégiques et spatiaux d’Aérospatiale) qui présenta au sénateur Loridant un projet d'Ariane 5 lunaire permettant de faire alunir 35 tonnes sur notre satellite. A l'aune de ces perspectives on jugera de la faiblesse actuelle de l'Europe incapable d'amener à poste ses propres astronautes et qui projette, sur 35 ans, l'ambitieux programme Aurora sans se donner les moyens politiques et financiers de ses visions. Les fonds alloués aux études sur les récupérables sont chichement attribués, il n'y a pas d'études sur un super-lanceur lourd qui pourrait remplacer les versions les plus performantes d'Ariane 5 ni sur un programme de recherches sur les moteurs nucléaires qui puisse prendre le relais du défunt programme YAPS du CNES et du CEA. Notre point de vue est que le triptyque Ariane 5-Hermes-Columbus, bien inférieur technologiquement aux programmes dont nous venons de parler, était le passage obligé pour acquérir les compétences scientifiques et technologiques nécessaires au passage à un stade infiniment supérieur. Nous ne nous étendrons pas trop sur Ariane 5, qui est le vecteur, en traitant seulement des compatibilités entre le lanceur lourd européen et Hermes qui était, nous allons le voir, un véritable défi technologique. De 1987 à 1990, en dépit de quelques obstacles technologiques (comme la maîtrise de la technologie des piles à combustibles), le déroulement du programme s'effectua parfaitement sur les rails où l'avaient mis les ministres européens lors de la Conférence de La Haye. Au début de l'année 1990, alors que rien n'avait encore été remis en cause, les dépenses du plan spatial à long terme en total cumulé 1992-2005 se montaient à 7557 millions d'UC 1990 pour Columbus et 8941 millions d'UC pour Hermes. Rappelons que Columbus se composait du laboratoire autonome MTFF (Man Tended Free Flyer Laboratory) et du laboratoire APM (Attached Pressurized Module) rattaché à la station Freedom et que, après lancement respectivement par Ariane 5 et le Shuttle, tous les deux pouvaient être visités par Hermes. Mais dès cette époque l’ESA envisageait également, tout en préparant l’ère Columbus avec le Spacelab et la plate-forme récupérable Eureca, de payer en nature une partie de sa contribution aux frais de fonctionnement de la station sous la forme de prestations de transport de fret par Ariane 5: cela nécessitait la mise au point d'un cargo européen automatique qui allait devenir l'ATV (Automated Transfer Vehicle) capable de délivrer 10 tonnes de matériel à la station ISS, de pouvoir rehausser l'orbite de la station et de servir de refuge aux astronautes en cas d'accident sur la station. Cette dernière option pourrait être viable au prix de quelques modifications sur l’ATV. Pour tout un tas de raisons qui apparaissent de plus en plus clairement, le programme Hermes, en n'ayant pas été poursuivi, crée un manque non seulement en capacité d'intervention humaine dans l'espace mais également sur le plan technologique à la fois pour ce qu'il aurait été possible de faire avec mais également pour préparer les étapes ultérieurs avec des concepts plus ambitieux pour lesquels Hermes aurait été un galop d'essai. D'autre part, avec le vide qui se dessine actuellement en matière de desserte efficace de grandes structures en orbite basse, Hermes aurait pu permettre à l'Europe une totale liberté d'accès à ISS et préparer nos astronautes à un programme lunaire. Le défi que représentait toutefois Hermes ne doit pas être sous-estimé sur le plan technologique: il y a à la fois des contraintes liées à la capacité d'Ariane 5 et des contraintes technologiques liées à l'avion spatial lui-même.

-Pour ce qui concerne les contraintes liées à la capacité du lanceur, il fallait optimiser la forme et la morphologie de l'avion spatial avec les spécificités permises par Ariane 5.Celle-cî permet deux possibilités: soit une capsule avec tourelle de sauvetage, soit un avion spatial réutilisable tous les deux placés au sommet du composite supérieur de la fusée au moment du lancement. Les capacités d'Ariane 5 jouent donc sur le poids, la taille et la morphologie de l'avion spatial. La conséquence la plus directe de ce que nous venons d'écrire c'est que, pour cet engin spatial réutilisable capable de revenir à terre en vol plané, la configuration retenue car obligée, limite la surface de la, voilure pour ne pas perturber la trajectoire du lanceur. Dans un premier temps, et selon les spécificités définies au début du programme Ariane 5, Hermes ne pouvait être qu'un véhicule d'une vingtaine de -tonnes susceptible d'emporter un équipage de 3 hommes et une charge utile de 3 tonnes. Rien à voir avec le Shuttle et Bourane dont la charge utile est de plusieurs dizaines de tonnes. Pour ce qui concerne cette surface de la voilure, les contraintes dues à Ariane 5 première version conduisaient à limiter celle-ci à 85 mètres carrés. Selon Jean-Charles Poggi : ''Tout autre choix aurait nécessité le développement d'un lanceur spécifique plus puissant’’. Pour ce qui concernait les contraintes de poids, celui-ci, selon le sénateur Paul Loridant, ''constituait une des difficultés majeures du programme".Le problème du poids lié à la capacité du lanceur était d'autant plus compliqué que certains choix effectués tendaient à alourdir la masse du véhicule:c'était notamment le cas du système de sièges éjectables (toutefois plus léger que celui de la cabine éjectable un moment envisagé. D'autre part, constituant également un supplément de poids mort, la solution du châssis d'aluminium protégé par des boucliers thermiques, et qui fut préférée à celle jugée risquée d'une cellule en matériaux thermostructurants (résine haute température).Le poids de la navette a dû être augmenté, par rapport au cahier des charges initial qui était de 21 tonnes, pour passer à 24 tonnes:ceci a entraîné le développement d'un moteur Vulcain Mark 2 plus puissant pour un nouveau concept d'Ariane 5, en configuration vol habité, dénommé AR Mark 2.

-Pour ce qui concerne les contraintes technologiques liées à l'avion spatial lui-même, elles étaient assez sévères mais constituaient un défi motivant et structurant qui pouvait nous permettre un bond dans l'avenir et, sur le plan des matériaux, nous permettre une avancée vers une première génération d'engins récupérables. Parmi ces contraintes spécifiques à Hermes, notons que la petite taille de l'avion spatial européen augmentait les températures extrêmes que celui-ci devait supporter lors de la phase retour vers la Terre au moment de la pénétration dans l'atmosphère. Selon Jean-Charles Poggi, la surface de la voilure de 85 mètres carrés limitait, en plus, à 17 tonnes la masse de l'avion rentrant dans l'atmosphère. Un poids plus important à surface égale aurait compliqué les problèmes de protection thermique à résoudre et rendu plus critique la phase d'atterrissage. Ce problème est apparu peu a peu au fur et à mesure des recherches de R&D et la solution retenue, avant la dilution progressive du programme, était de regrouper, dans un module largable de 7 tonnes, tout ce qui n'était pas nécessaire à la rentrée du véhicule: système propulsif, d'accostage et d'arrimage, centrale de contrôle thermique sur orbite réservoirs. Les principales difficultés technologiques du programme liées aux contraintes de poids et de dimensions, imposées par le carcan d'une capacité d'une Ariane 5 même dopée, tenaient à la présence d'un équipage de 3 hommes à bord et à la rentrée atmosphérique. Les études préliminaires ont montré que le savoir-faire européen était apte à la réalisation d'une navette permettant à 3 astronautes de vivre et de travailler. Un handicap est apparu rapidement à cause de la faiblesse du niveau des recherches en France et en Allemagne en matière de piles à combustibles (malgré quelques progrès en ce qui concerne les électrodes et la gestion de l'eau). Ceci explique l'appel à l'aide qui a été fait en direction de l'industrie spatiale russe très compétente dans ce domaine. Une autre contrainte technologique concernant la sécurité des équipages, une fois écartée la solution de la cabine éjectable, fut retenue, à savoir une solution de sièges éjectables inspirée de la navette russe Bourane. Ce système était capable de fonctionner jusqu'à Mach 2, c'est à dire dans les toutes premières minutes du lancement et peu avant l'atterrissage. Parmi les autres défis technologiques à relever pour Hermes, et dû à sa rentrée en vol plané dans l'atmosphère, les principaux défis à relever concernaient l'aérodynamique hypersonique et les matériaux de protection thermique. Dans ce domaine les équipes Hermes travaillèrent à fond sur les connaissances aérothermiques fondamentales au moyen de simulations informatiques et de mesures expérimentales faites dans les souffleries françaises et allemandes. D'après Michel Courtois (CNES), au début 1993, il ne restait plus pour l'aérodynamique que quelques corrélations à vérifier entre les essais et les calculs pour que la forme définitive de l'appareil soit figée. Les industriels auraient alors pu lancer la fabrication de la structure. Pour ce qui concerne les protections thermiques, le défi consistait à développer des céramiques (carbone-carbone ou carbone-siliciure de carbone) à la fois légères, résistantes à l'oxydation et capables de supporter de très hautes températures. Les structures chaudes de l'appareil (nez, bords d'attaque et dérives) devaient être fabriquées directement dans ces matériaux qui devaient servir également -a la réalisation de plaques de protection pour le fuselage et la voilure. Des progrès réels furent effectués dans ces domaines mais des difficultés apparurent dans le déroulement du projet: ce fut le cas pour les structures chaudes où l'expérience révéla des insuffisances au niveau de la protection anti-oxydation du matériau pendant le retour. D'autres problèmes inattendus se révélèrent au niveau de la fiabilité du logiciel de bord chargé, entre autres missions, d'assurer le pilotage du lanceur durant la phase ascensionnelle de la mission, au niveau des écrans à cristaux liquides du poste de pilotage et de l'interface antennes de communication-protection thermique. Des améliorations pouvaient être également apportées pour ce qui concerne le lanceur dont la version initiale se révélait incompatible avec un lancement Hermes mais, dans ce domaine, l'inexpérience des ingénieurs européens et les invités inattendus des problèmes technologiques allaient contribuer à crucifier un programme qui n'est pas seulement mort du manque de volonté politique et d'un manque de moyens financiers. La version Mark 2 d'Ariane, qui allait contribuer plutôt à une amélioration du lanceur pour la mise -à poste de satellites, aurait permis pour Hermes première version un accroissement de 20 % de la poussée du lanceur en portant à 171 tonnes la masse d'ergols. Autre possibilité étudiée à l'époque, l'équipement de l'étage cryotechnique inférieur de 2 moteurs Vulcain en portant à 210 tonnes sa masse d'ergols : avec cette solution il aurait été possible à la fois d'accroître de 3,5 tonnes la capacité de mise en orbite basse d'Hermes et d'améliorer la sécurité des vols habités. En cas d'arrêt de fonctionnement d'un des moteurs en cours de propulsion, l'autre moteur aurait permis à Hermes d'atteindre malgré tout une vitesse compatible, après sa séparation du lanceur, avec un retour au sol normal alors qu'avec la version monomoteur d'Ariane 5, l'équipage serait sauvé par les sièges tandis que l'avion spatial aurait été perdu.
Les principales étapes du plan de développement initial étaient les suivantes:

- début de la phase 1 de développement qui devait durer trois ans à partir de Janvier 1988
- début de la phase 2 de développement en Janvier 1991 - début des essais subsoniques en 1996
- premier vol non habité (HO01) mi-1998 - premier vol habité (H02) début 1999
- première mission de desserte de Columbus en 1999

On sait ce qu'il advint de ce calendrier puisque les conférences de Munich (1991) et de Grenade (1992) ont sonné le coup d'arrêt du programme avec pour conséquence, outre une dispersion des compétences, qu'en matière de vols habités notre Continent est mal armé Pour affronter le vingt-et-unième siècle et répondre aux défis qui devraient se présenter. Pour juger objectivement de l'échec d'Hermes il faut toutefois souligner que nous étions techniquement sur une mauvaise voie à cause des problèmes imprévus et que les ingénieurs et techniciens européens n1avaient aucune expérience du vol habité. Outre l'incontestable problème posé par la dérive financière du projet due à de sans cesse modifications, on doit prêter une oreille attentive à l'opinion d'experts russes, consultés par le CNES, selon laquelle le concept choisi fut mal appréhendé au regard des possibilités de la fusée porteuse Ariane 5. D'autre part la navette passive européenne, faiblement motorisée, disposant seulement de petits moteurs de contrôle d'attitude dans l'espace destinés à son injection sur l'orbite de travail désirée et aux manoeuvres de désorbitation avant rentrée atmosphérique hypersonique, a subi de constantes mais coûteuses évolutions:remplacement, de la soute ouverte par une soute pressurisée, adjonction du module de ressources Pm destiné à se désagréger dans l'atmosphère après utilisation, abandon du projet démonstrateur automatique X-2000, abandon du projet de démonstrateur version réduite MAIA, débat sans fin sur le choix d'un siège éjectable, réduction progressive de la charge utile prévue, passant de 4,5 tonnes à 3 tonnes puis à 2,5 tonnes. Il n'est pas inutile non plus de revenir sur le problème de compatibilité entre le lanceur Ariane 5 et l'avion spatial proprement dit: au fur et à mesure de l'avancement des études de développement , il s'est avéré qu’Hermes était pratiquement irréalisable en limitant son poids aux alentours de 24-25 tonnes (solution à HM-60) et que, pour maintenir la cohérence du concept, il fallait optimiser celui-ci aux alentours de 30 tonnes ... ce qui dépassait largement les possibilités d'Ariane 5 mais était techniquement viable dans le projet de navette euro-russe (dite encore ''porte-Hermes'') proposé -à l’ESA par l'agence spatiale russe RKA à la suite de la divulgation du projet ISTS (système de transport spatial international) consistant en un concept ORC équipe d'un étage récupérable et présenté au colloque annuel de l’IAF 92 par S.F. Kostronin et V.M. Sourikov de l'Institut Central de Recherches de Construction de Machines TSNII-MACH. Même si le manque de volonté politique et la crise financière sont les deux causes principales de la dilution de l'ambitieux proqramme spatial concocté en Novembre 1987 à La Haye, il faut bien reconnaître aujourd’hui que le projet Hermes manquait quelque peu de réalisme au niveau de sa mise en oeuvre et qu'en l'état du niveau de ses techniques spatiales, l'Europe aurait peut-être mieux inspirée de se tourner vers d'autres solutions plus ''classiques'' avant de faire progressivement ultérieurement le saut vers le récupérable. Avec une capacité de mise en orbite basse de 15 à 22 tonnes pour le lanceur Ariane 5, une solution existe bien sûr pour l'Europe, à savoir la capsule: cette solution aurait pu apparaître quelque peu ''rétro'' il y a quelques années en nous ramenant à l'époque des Mercury, Gemini et Apollo mais, l'actualité aidant, il ne faut pas oublier que la société Boeing ne propose rien d'autre qu'une capsule pour remplacer, à titre d'Orbital Space Plane, le Shuttle actuel. D'autre part il ne faut pas oublier non plus que le vaisseau spatial russe Soyouz-TM n'est dans sa phase retour ni plus ni moins qu'une capsule freinée par des parachutes et que la version actuelle n'est qu'une simple amélioration d'un concept que les Russes utilisent avec succès depuis Octobre 1968.

.CTV, CRV: les voies possibles pour les Européens.
Une fois abandonné le programme Hermes et sérieusement écorné le programme Columbus avec la réduction de l’APM, qui allait devenir le COF, et la disparition du MTFF (qui était le premier justificatif à la mise en oeuvre de l'avion spatial européen), certains, au sein de l’ESA, pensaient déjà à la solution capsule en envisageant pour ce choix des acquis technologiques plus modernes que celles qui avaient été mises en oeuvre auparavant sur ce créneau par les deux plus grandes puissances spatiales. Bien avant les accords qui allaient aboutir à la station spatiale Alpha qui allait devenir ISS, l’ESA mit au point un programme de démonstration de technologies dénommé MSTP (Programme de moyens de transport spatial habité) dont la méthode de développement était basée sur 3 axes : programmes informatiques complexes, moyens d'essais aérodynamiques et thermodynamiques, vols de démonstration de modèles représentatifs. La méthode suivie était comparable à celle qui était envisagée pour le véhicule de transfert automatique ATV : maîtrise des techniques de lancement, des opérations de proximité et des techniques de rendez-vous et d'accostage. Déjà l’ESA et le CNES envisageaient, en 1993, un projet de véhicule de transport dénommé CTV (Crew Transport Vehicle) qui allait être officialisé en Octobre 1995 avec un budget de recherches de 350 millions de francs pour identifier les techniques les plus critiques:opérations de rentrée et d'atterrissage (aérodynamique et aérothermodynamique), systèmes de protection thermique, de parachutes et d'amortissement, méthodes de pilotage, de localisation et de récupération. Lorsque l'on voit la situation actuelle, le projet étant pratiquement abandonné par manque d'un soutien politique fort, on ne peut qu'être scandalisé par l'hypocrisie des dirigeants politiques français et allemands qui, en 1995, déclaraient qu'il n'était pas question de remettre en question l'existence même de ce projet .... Pour la mise en oeuvre de celui-ci des sociétés comme DASA et surtout Aérospatiale étaient parfaitement compétitives puisqu'elles avaient étudié sur fonds propres des projets de véhicules de secours amarrés à une station spatiale et dénommés soit ACRV (Assured Crew Recovery Vehicle) soit CRV (Crew Rescue Vehicle). A l'époque où furent présentés ces concepts, soit peu de temps auparavant l'arrêt de l'avion spatial Hermes, les autorités spatiales françaises et russes tinrent un certain nombre de réunions en prônant une collaboration en deux étapes: Nécessaire modernisation du Soyouz dans un premier temps, puis, s'inspirant des concepts proposés par Aérospatiale, programme bilatéral russo-europén pour un nouveau type de CRV. Ceci en tenant compte à la fois du fait que le Soyouz-TM, accepté par les Américains pour jouer provisoirement le râle de CRV, reste le seul véhicule actuellement disponible pour un amarrage permanent à ISS et, aussi, que ce véhicule russe, dont le volume habitable ne dépasse pas 8,5 mètres cube pour 3 cosmonautes en tenant compte des plus récents aménagements, apparaît techniquement dépassé. La demande récente du gouvernement américain auprès des autorités russes de mettre au service d'ISS deux Soyouz améliorés ne manque pas de piquant même si certains milieux rechignent à cette solution pour des problèmes de -transfert de technologie. La position des autorités françaises de l'époque (1992-93) était toutefois restrictive puisqu'en l’absence d'un concept complémentaire, ce véhicule ACRV ou CRV, compatible avec Ariane 5, n'offre que des possibilités réduites en matière de transport spatial habité devant effectuer des missions régulières en version mixte (passagers plus charge utile scientifique ou matériel). De plus si les spécificités de la station avaient été respectées (ce qui n'est pas le cas avec la position américaine actuelle contraignant à un équipage réduit de 3 hommes), elles auraient impliqué une capacité de retour de 5 à 6 hommes. A un certain moment il semblait que l'on allait s'orienter vers une coopération tripartite USA-Russie-Europe, dont la plus grosse partie du financement serait américaine, mais de conception d'ensemble russo-américaine en vertu de l'accord conclu entre ces deux pays le 17 Juin 1992. Un des volets de cet accord concerne les études de compatibilité des systèmes de rendez-vous et d'amarrage des deux pays, ainsi que la conception de véhicules classiques balistiques plus économiques que la navette Ceux-ci pourront être ailés et devront comporter un niveau de précision d'atterrissage au retour très supérieur aux systèmes utilisés auparavant. Le récent projet de vaisseau Klipper correspond en tout cas aux termes de cet accord et pourrait être accepté par les Américains. A la suite de l'échec du programme Hermes, le concept capsule, en tant que vaisseau de transport revint sur le devant de la scène peu avant l'émergence du concept CTV. Les avantages de la technologie des capsules sont bien connus:coût de vol inférieur à un concept de type Hermes, souplesse d'accès aux infrastructures desservies, sécurité de l'équipage, expériences économiques à bord. Le regretté René Pellat faisait valoir que les capsules ne sont pas des engins purement balistiques mais disposent d'une certaine portance, qu'elles peuvent être lancées en toutes circonstances, qu'elles sont plus robustes et plus simples, qu'elles sont bien adaptées à certaines expériences de microgravité ou de sciences de la -vie. René Pellat pensait qu'il pouvait s'agir d'une solution de repli en cas de difficultés rencontrées dans le développement des programmes Hermes et Columbus. C'est exactement ce que fit l’ESA avec son programme MSTP en utilisant, pour ce faire et pour valider les technologies de rentrée, la capsule ARD (Atmospheric Reentry Demonstrator) qui fut larguée le 21 Octobre 1998 à une altitude de 216 kilomètres par la fusée Ariane et amerrit en un point situé entre les Îles Marquises et Hawaii. ARD était un démonstrateur de 3 tonnes fort ressemblant à ceux utilisés par le passé par les USA et la Russie pour maîtriser les technologies de rentrée. Notons qu'il s'est passé 3 ans entre la grande déclaration de mise en chantier au CTV et le vol ARD. Sur le plan des principes, le CIV, véhicule de transport d'équipages compatible avec Ariane 5, est capable d'envoyer vers la station soit 4 astronautes avec une charge utile accompagnatrice de 400 kilos, soit 6 astronautes en version 'tout passagers''. L'intérêt d'un tel engin, qui offrirait une réelle forme d'autonomie aux Européens,serait double:pour l'envoi d'un équipage de spécialistes vers ISS, le CRV européen coûterait moins cher que la navette américaine dont le coût de chaque vol est estimé, selon la configuration, entre 500 et 900 millions de dollars. D'autre part un tel système offrirait à l’Europe une certaine souplesse pour l'envoi d'une mission habitée en cas de nécessités urgentes de réparation par des astronautes spécialisés. Un autre avantage serait de pouvoir développer, à partir du CTV et un départ d'ISS, un véhicule habité lunaire. Malheureusement le programme est gelé depuis 1998 alors que les potentialités évolutives d'Ariane 5 pourraient nous permettre une Ariane 5 lunaire et que les spécialistes de Snecma Moteurs Alain Souchier et Dominique Valentian ont présenté à la convention européenne 2001 de Mars Society des projets relatifs à des versions d'Ariane 5 capables de placer 80 à 140 tonnes en orbite basse. Mais, bien avant ces études, il existait déjà dans les cartons des projets visant à faire des dérivés d'Ariane 5 des vecteurs importants pour le vol habité. Dans le début des années 90, Ariane apparaissait comme pouvant constituer la colonne vertébrale d'autres développements évolutifs envisagés comme suit :

- soit un lanceur classique opérationnel pour les années 2015 à 2020 et conçu autour d'un système de 4 boosters et d'un étage cryotechnique principal équipé cette fois de 4 moteurs de quatrième génération dérivés du HM-60. Cette solution pouvant encore être améliorée par l'introduction de moteurs à méthane, fut présentée au congrès IAF de 1989 par l'ingénieur Johnson du CNES et Jean-François Lieberherr de l’ESA. Elle rejoint sur certains points la solution souhaitée par Roger Vignelles (ex CNES et ex SEP) et nous ferait entrer dans la gamme des lanceurs de la classe 40 à 60 tonnes avec la possibilité de mise en orbite basse d'une grosse navette à décollage vertical.

- soit un lanceur bi-étage partiellement récupérable (à l'exception de deux petits réservoirs d'hydrogène liquide flanquant le second étage) inspiré des études sur le concept Taranis effectuées chez Aérospatiale par l'équipe de Patrick Eymar. Les avantages de cette solution seraient d'architecturer ce lanceur autour de plusieurs moteurs Vulcain dérivés du système de propulsion de l'actuelle Ariane 5, de permettre une plus grande flexibilité par rapport à un lanceur classique, et d'offrir des possibilités pour une version habitée.
Alors que certaines études ESA refleurissent pour offrir des solutions soutenant le,développement d'un accès indépendant européen à l'espace habité (capsule de 21,9 tonnes, navette inspirée d'Hermes), il faut avant tout souhaiter que nous ne soyons pas encore déçus, une fois de plus, par les hommes politiques.

PHlLlPPE JAMET

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  • La Lune peut-elle être un arsenal ?
 
 

A la suite de l’intervention du Président Bush, le 14 Janvier 2004, sur la stratégie adoptée pour la politique spatiale américaine, parmi les multiples remarques, nous entendîmes de nombreuses critiques sur l’utilité d’un retour de l’homme sur la Lune. En dehors de la négation de l’intérêt du vol spatial humain en général – étayée par des empirismes du genre : « cet argent serait mieux dépensé à régler des problèmes sociaux ou d’environnement sur Terre », contre vérités auxquelles nous nous sommes opposées dans ces lettres et que nous continuerons de combattre - l’impératif d’un retour sur notre satellite naturel voit deux types d’arguments se lever contre lui. Certains prétendent : « Cela a déjà été fait, la Lune a été visité, passons à autre chose ! » En guise de réponse, nous adopterons celle faite par Mike Griffin de la NASA, dans le journal SPACE NEW du 19 janvier 2004, suite à la même observation : « … Non, pas réellement. A moins que l’on puisse considérer ‘comme fait’ six voyages pour un total passé d’environ un homme-mois sur une planète ayant une surface égale à celle de l’Afrique… » D’autres affirment, dans l’optique martienne, qu’un passage par la Lune est inutile, l’homme ne peut rien y faire et n’a rien à entreprendre sur ce corps ; mais l’intérêt scientifique de la Lune est rarement mis en doute dans les milieux concernés et nombreux sont ceux, dans toutes disciplines, qui aimeraient en connaître un peu plus sur l’unique satellite de la Terre. Au moins, l’idée d’une base sur la Lune, à usage purement scientifique – si elle ne se fait pas au détriment d’autres programmes, ce qui paraît difficile dans le système économique actuel – semble accueillie avec intérêt. En effet dans l’ambiance culturelle existante, où la science quoique déclinante bénéficie encore de quelques aura, cet objectif consensuel reste le dernier que concédent de nombreux politiques ou intellectuels au programme spatial habité.
Cependant une lecture du document de la NASA : « The Vision for Space exploration », paru en Février 2004 montre que le but à propos de la Lune va au delà de l’exploration.

« B. Exploration de l’espace au delà de l’orbite basse : la Lune.

• Entreprendre des activités d’exploration lunaire pour être capable de soutenir l’exploration humaine et robotique de Mars et vers des destinations plus lointaines dans le sytème solaire.
• Débuter, pas plus tard que 2008, une série de missions robotiques vers la Lune pour préparer et soutenir des activités humaines d’exploration.
• Dès 2015, mais pas plus tard que 2020, conduire la première expédition humaine prolongée sur la surface de la Lune.
• Utliser les activités d’exploration lunaire pour promouvoir la science, et développer et vérifier de nouvelles approches, technologies et systèmes, incluant l’utilisation des ressources lunaires et de l’espace, afin de soutenir l’exploration humaine spatiale vers Mars et d’autres destinations.
»

Et il s’agit bien de ce dernier paragraphe, concernant l’utilité de la Lune du point de vue industriel, technologique, d’entraînement et d’exploitation des ressources lunaires que d’autres contestent dans l’optique martienne.
Avant tout et d’une manière identique à celle de Bryan Chase, directeur exécutif de la NSS Amérique, nous affirmons que si le Président Bush avait choisi l’option « Mars direct » proposée par Robert Zubrin, nous aurions soutenu cette approche avec la même vigueur. En effet cette voie conduit au même but : une civilisation étendant ses activités à l’espace, et l’auteur du vol direct vers la planète rouge l’a très bien démontré dans ses trois écrits fondamentaux. Cependant dans le cadre de la NSS France, nous introduisons quelques nuances ; « Mars direct » fut publié en 1996 en réaction aux coûts annoncés à la suite de l’Initiative Spatiale (SEI) du père de l’actuel président, et cette « folie » fut évaluée à 450 milliards de dollars, sans aucune explication ni échelle dans le temps ! Deux réactions étaient alors possibles : soit faire « maigrir » financièrement donc technologiquement le projet, ce que fit Robert Zubrin, en le dépouillant de ses « Battlestars Gallactica » et en utilisant une combinaison d’astuces très intelligentes, (vol direct, succession des missions, productions in situ etc) pour aboutir à l’option « Mars direct » dont les coûts furent divisés par dix. Soit faire remarquer (ce que nous tentâmes de faire sans grand succès) que ces 450 milliards de dollars étaient une évaluation grossière, s’étalant « grosso modo » sur une trentaine d’années, et somme toute approchant les capacités de l’Agence sur cette période de temps, en conséquence la SEI n’était peut-être pas si saugrenue que cela ! « Mars direct » est un coup de dés technique, politique et médiatique : abaisser les coûts du projet afin de faire accepter le programme au Congrès en espérant que chemin faisant l’intérêt du public se lèverait est une stratégie. Mais si la surenchère à la réduction des coûts est un aiguillon, elle peut-être aussi sans fin dans le système politico-économique actuel et ne jamais déboucher sur une réalisation ; de plus, ce principe, intellectuellement gênant, aggrave les risques dans les premières missions. « La vision pour l’exploration de l’espace » de l’actuel président américain est plus classique, plus longue, plus méthodique, et semble avoir assimilée les leçons sur la « légèreté et de la superficialité » du monde politique et médiatique chargé de « construire » l’opinion. Un mélange des concepts innovants de Robert Zubrin et des idées de la NASA ou de Paul Spudis devrait fournir le cocktail idéal. Mais dans tous les cas il nous semble difficile de concevoir la naissance et l’évolution d’une colonie martienne dynamique qui laisserait la Lune de côté ou l’utiliserait comme une simple curiosité scientifique.
La Terre possède une atmosphère substancielle et présente un puit gravitationnel conséquent, ces deux caractéristiques entraînent une dépense d’énergie et un effort technologique non négligeables afin de monter ou de descendre une charge de l’orbite basse. Dans le cas d’une civilisation voulant étendre progressivement ces activités au Système Solaire, ne se contentant pas de quelques explorateurs visitant la Lune ou Mars, des infrastructures proches de la Terre sont impératives afin d’étudier, de comprendre, d’essayer, de receptionner et de construire pour ensuite expédier. La Lune, soumise aux radiations diverses, sans atmosphère, avec une gravité faible, avec ses températures extrêmes, en plus d’être un objet d’études scientifiques ou une plateforme d’observations astronomiques peut-elle être une zone industrielle ou un arsenal afin de soutenir l’expansion de l’humanité dans le Cosmos ?
Nous ne tenterons pas de répondre à cette question avec une énième démonstration à coups de techniques, de sciences physiques ou sociales, car il est évident que les problèmes bloquants cette entreprise n’émanent pas de ces origines ; ils proviennent plutôt des concepts actuels soutenant l’économie et la finance, induisant une gestion de la planète à des années lumières de ce genre d’entreprise, ou de l’option directe vers Mars. La faiblesse de la proposition du Président Bush, avec sa budgetisation réduite au strict minimum, acquise principalement par des transferts, vient de la dichotomie entre une vision parfaitement réalisable et un processus économique appuyé par une ambiance culturelle inapte à soutenir le projet. Nous allons simplement regarder si cette idée de base industrielle est étayée par des études concrètes, nous vous indiquerons quelques références et endroits où il sera possible de trouver ces recherches. La majorité des travaux sont américains, bien que la Russie, le Japon et l’Europe aient aussi œuvré sur le sujet ; cet article n’est pas exhaustif et l’auteur espére des contributions de lecteurs tolérants.
Un premier article méritant l’attention : « The Lunar Base », à propos d’activités sur la Lune, parut dans le « Journal of the British Interplanetary Society » (Volume 10 numéro 2) en Mars 1951, sous la plume d’un spécialiste en chimie et en métallurgie : G.V.E. Thompson. A cette époque, où l’on ne dispose pas de satellites, ni des matériaux rapportés par Apollo, l’auteur en utilisant les résultats des observations astronomiques, ainsi que la déduction scientifique élabore une composition de la Lune et une chimie sélène. Il considère qu’une base lunaire, en plus de sa fonction scientifique, serait utile comme centre de production et d’avitaillement en ergols pour les vaisseaux spatiaux, l’entretien de ces derniers pourrait également y être assuré. Cet article fondamental fut réédité dans le supplément au journal de la Société anglaise pour son soixante dixième anniversaire. (« Space Chronicle » Volume 56, suppl. 1, 2003)
G.E.V. Awdry abordait également ce sujet : « Development of a Lunar Base » dans le « Journal de la British Interplanetary Society » (Volume 13 numéro 3) en Mai 1954.
Arthur Clarke, un autre membre de la British Interplanetary Society écrivait en 1952 dans le magazine « Science Popular » à propos de ce que l’on pourrait faire sur notre satellite naturel : « Si nous voulons établir des colonies permanentes sur la Lune, il est essentiel de découvrir de l’oxygène, de l’eau et des matériaux à partir desquels la nourriture peut-être obtenue. » En 1950 dans le Journal de la Société (Volume 9 numéro 6) il envisageait un système electomagnétique pouvant lancer des matériaux de la Lune vers un vaisseau en orbite. La construction d’une base lunaire était envisagée dès 1951 dans un de ces premietrs ouvrages : « The Exploration of Space ». Une version française « L’exporation de l’espace » fut publiée chez Denoël, elle peut encore se trouver chez les libraires d’occasions.
Werhner von Braun, Fred Whipple, Willy Ley ainsi que Cornélius Ryan, à la suite d’une série d’articles dans le magasine « Collier », éditèrent un livre en 1953 « Conquête de la Lune » dans lequel une base sur la Lune était envisagée pour des motifs scientifiques et d’exploration.
Les travaux intellectuels sur la création d’infrastructures à usages scientifiques, techniques ou industrielles dans le milieu difficile de notre satellite naturel se poursuivront désormais continuellement. Des chercheurs, comme le professeur et directeur du Laboratoire de Recherche sur les Mines John S. Rinehart de l’Ecole des Mines de Golden dans le Colorado, consacraient des articles sur le sujet dans des publications concernées comme le « Journal of the British Interplanetary Society » : « Basic Design Criteria for Moon Building » (« JBIS » Volume 17 numéro 5, September-October 1959). Nous trouvons aussi dans cette publication, sur la même veine : « Structural Problems of the Lunar Base » par P.L. Sowerby (« JBIS » Volume 13 number 1, Janvier 1954) ; « Farming on the Moon » de J.W.E. Sholto Douglas où sont abordés les techniques hydroponiques et « Extra terrestrial mining » de A.J.W. Rozelaar dans le « JBIS » Volume 15 numéro1 Janvier-Février et numéro 6 Novembre-Décembre 1956. D’autres publications ou organisations étaient aussi concernées comme le « Space Journal » qui, dans son premier numéro en 1958 proposait un article de H. Kumagai sur : « A Proposal for a Village on the Moon » ; ou, la même année, le « Colloque sur l’exploration Lunaire et Planètaire » avec un papier dans lequel M. O’Day parlait des problèmes de la fourniture d’énergie pour une colonie lunaire.
Il est assez difficile de trouver en France une collection complète, ouverte au public du « Journal de la British Interplanetary Society », cependant la bibliothèque du « CEDOCAR » en possède certaines années, sinon la Bibliothèque de la Société Interplanètaire reste accessible à Londres.
En Mars 1959 le lieutenant-général Arthur C. Trudeau, chef de la Recherche et du Développement de l’Armée Américaine lançait la première étude d’un avant-poste sur la Lune, la coordination et l’édition de cette dernière revenait au major-général John Bruce Médaris qui dirigeait l’Army Ordnance missile Command. L’Agence militaire pour les missiles ballistiques (Army Ballistic Missile Agency) dans laquelle travaillaient entre autres Wernher von Braun, Ernst Stulhinger et Heinz Hermann Koelle fut chargée de l’étude. Le projet, dont le premier objectif était de maintenir l’initiative de l’Armée dans le développement de l’espace, devait, en dehors des buts de surveillance et de reconnaissance, soutenir entre autres l’exploration et une investigation scientifique de la Lune, permettre l’installation d’un laboratoire recherche fondamentale et appliquée dans le milieu spatial et une activité de développement. Cet avant-poste en faible gravité aurait été utilisé comme site de lancement pour une exploration profonde de l’espace ; 12 hommes l’auraient occupé en permanence en 1966. Mais en Août 1959, le Président Eisenhower annonçait le retrait progressif de l’Armée des affaires spatiales, l’équipe de von Braun fut transférée à la NASA, l’étude suivit, cependant elle ne générait pas un grand intérêt. L’Agence Militaire pour les Missiles (ABMA) fit paraître en Février 1960 un rapport issu des recherches antérieures sur « Horizon », intitulé « A Lunar Exploration Program based upon Saturn-boosted System ». Un travail complet : « Projet Horizon : An Early Study of a Lunar Outpost » par Frederik I. Ordway, III, Mitchell R. Shape et Ronald C. Wakeford, parut au 21ème Symposium d’Histoire de l’Astronautique, à Brighton en Angleterre le 16 Octobre 1987, il peut-être lu dans le volume 15 de l’« American Astronautical Society, History Series » (ASS 92-331), qui se trouve à la « Médiathèque de la Cité des Sciences et de l’Industrie ».
Nous devons parler maintenant de Kraft Ehricke, un des pionniers allemands qui travailla à Peenemünde puis aux Etats-Unis, c’est à partir de cette époque qu’apparurent ses premiers écrits philosophiques. Les concepts de cet homme sur l’astronautique et l’évolution de l’humanité, quoique peu connus à l’extérieur d’un cercle très restreint demeurent fondamentaux. Dans un papier présenté au 45th Congrès de la Fédération International d’Astronautique à Jerusalem en 1994, la journaliste et historienne de l’espace Marsha Freeman se livrait à une fine analyse sur la signification de l’œuvre d’une personne qu’elle connaissait très bien. Cette rétrospective de quelques pages intitulée : « Kraft Ehricke’s Extraterrestrial Imperative : A memoir » peut être trouvée dans le volume 23 de l’« American Astronautical Society, History Series ». Parmi les nombreux textes de l’auteur, nous remarquons trois périodes concernant la conceptualisation de la nécessité des activités humaines dans l’espace et notamment sur la Lune.


• « The Anthropology of Astronautics » parut dans le journal « Astronautics » en Novembre 1957. Ce premier texte d’Idées est important pour ceux cherchant un devenir à l’humanité. Kraft Ehricke y inscrit l’évolution de la vie, le développement de l’humain avec sa capacité à créer, dans l’expansion de la vie intelligente dans le Cosmos. Par la mise en évidence de « trois lois », il précise parfaitement ce que pourrait être une issue avec le développement d’une civilisation spatiale. Les écrits suivants approfondirent et s’appuyèrent tous sur ces concepts.
• Vingt ans de réflexions aboutirent à « The Extraterrestrial Imperative » publié dans le « Journal of the British Interplanetary Society » en 1979 pour la première partie: « Evolutionary Logic » ainsi que la seconde: « Productive Earth Orbits – New Partnership through Pressures and Promise ». La troisième le fut dans le même journal en 1980: « New Earth – Space Energy Metabolism – 1 » Ces textes, avec d’autres, devaient faire l’objet d’un livre qui ne parut jamais, Kraft Erhicke étant décédé en 1984.
• Pour Kraft Erhicke, choqué par les théories malthusiennes qui fleurissent avec la fin des années soixantes, le développement industriel de l’humanité dans l’espace est vital pour la croissance : « L’acquisition de nouveaux environnements : ouverts comme celui des orbites et ceux de types lunaires – incluant la Lune, Mars, Mercure, et les astéroïdes – qui, malgrè toutes leurs différences ressemblent à l’ambiance lunaire plus qu’à celle de la Terre ou à d’autres planètes : faible gravité, surface rocheuse, peu ou pas d’atmosphère, de même que pour l’accessibilité et la maniabilité, commence avec la Lune. Nous avons de la chance d’avoir un environnement de type lunaire à quelques jours de voyage de la Terre. Ainsi l’industrialisation de la Lune sera cruciale pour l’expansion industrielle extraterrestre. L’entreprise est au mieux immense (quoique se maintenir dans le confinement terrestre pour un autre siècle serait une tâche bien plus grande). Sans la Lune, les difficultés et les coûts seraient accrus de plusieurs ordres de grandeur. … » Une succession d’écrits très affinés concernant l’exploitation et l’économie autour et sur la Lune pour le bénéfice de la Terre suivit :


- « Lunar industries and their value for the human environment on Earth », présenté au Congrès International d’Astronautique de Vienne en 1972 et publié dans le volume 1 numéro 5-6 de la revue « Acta Astronautica » en mai-juin 1974.
- « A socio-economic evaluation of the lunar environment and resources : I. Principles and overall system strategy. II. Energy for the selenosphere », présenté au Congrès International d’Astronautique de Dubrovnik en 1978 et publié dans le volume 8 numéro 11-12 de la revue « Acta Astronautica » en novembre-décembre 1981.
- « Industrializing the Moon : The First Step into a New Open World », Part 1, dans le volume 5 numéro 6 de la revue américaine « Fusion » en 1981 et « The Extraterrestrial Imperative : Why Mankind must Colonize Space » en 1982 dans le volume 5 numéro 6.
- « Lunar industrialisation and settlement – birth of polyglobal civilization » parut dans le recueil des textes concernant le symposium sur les bases lunaires et les activités spatiales au 21 siècle, tenu à Houston en octobre 1984.
Les « Acta Astronautica » peuvent être consultés à l’ex bibliothèque du « CEDOCAR » à Paris ; pour les articles de la revue « Fusion » version française ou américaine ( cette dernière est devenue « 21st Century Science and Technology » dans laquelle écrit Marsha Freeman), nous vous conseillons les sites internet adéquats. Il en est de même pour le Symposium : « Lunar Bases and Space Activities of the 21 st Century », où le site du « Lunar and Planetary Institute » à Houston propose encore les textes de ce recueil.
A. T.
(à suivre)

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  • Epître à tous ceux qui, petits et grands, n'ont qu'un ''Loft'' à se mettre sous la dent - Georges Ballini.
 
 

Pour répondre à un souci d'identification du petit monde de l'espace et mieux cerner la nature des personnes partageant ce même intérêt, ou peut-être aussi pour comprendre l'attrait exercé par l'astronautique sur les esprits de notre temps, l'un d'entre nous, jouissant d'un site sur la toile et de l'estime générale, a prié ses compagnons de randonnées spatiales de répondre à une question qui, séparée du contexte, pourrait passer pour anodine : « qui êtes-vous » ? Recherche aventureuse s'il en fut ; dans ce domaine, le contexte est hautement signifiant. Face à la voûte étoilée et à notre détermination commune, l'apostrophe a quelque chose de redoutable ; elle revient en quelque sorte à ceci : qui êtes-vous, téméraire, pour prendre rang parmi les nautoniers de l'espace, qui êtes-vous, intrépide tenté par la démesure, par le ciel-océan qui ne se connaît pas de limite, par l'atteinte portée à l'humilité de la tradition, par les brèches d'accès au sommet de l'Olympe ? Qui donc êtes-vous pour vous sentir aussi grand ?
A bien y réfléchir, près d'un demi-siècle après la mise en orbite du premier satellite artificiel de la Terre, une démarche de cette nature se justifie pleinement. « Qui êtes-vous, jeune homme de tous les temps » ? Peut-être le psychologue et l'historien, trouveront-ils matière à réflexion dans les réponses apportées à une question aussi pertinente mais, quel que soit leur jugement, il n'en fallait pas davantage pour prendre la mesure de notre devenir. Sans plus attendre, les compétences surgirent, les aspirations se manifestèrent, chacun selon sa spécialité fit montre de vaillance. Pour construire un édifice structuré, il ne restait plus, semblait-il, qu'à planifier et à financer.


Hélas, c'est volontiers sur ce dernier point que la dynamique s'enraye. Le pas de géant qui nous est proposé 'exige, c'est évident, des avances de fonds d'une certaine ampleur ; les priorités conduisent les décideurs à privilégier d'autres dépenses ; les entreprises de presse commentent à l'envi ; économe de ses deniers, le contribuable s'exprime par son bulletin de vote ; et en fin de compte, l'organisme chargé de l'exécution de l'exploit dispose d'un budget toujours aussi dérisoire. A l'exception de l'Amérique où, le cirque électoral est en pleine effervescence, on réduit la voilure, on n'ose plus avancer un projet. Dés lors, pour raison garder, nos imaginatifs de la veille se replient sur des dérivatifs, nos initiateurs de navigations lointaines brident leur ambition, s'innocentent du crime de hardiesse, s'attardent aux détails technologiques de l'entreprise, se limitent aux trajectoires immédiatement négociables. Tout se conjugue comme si nos nouvelles capacités dépassaient nos moyens ; au point bas de nos protocoles, on se raccroche aux sondes institutionnalisées et dorénavant obligatoires qui, tous les vingt-six mois - fenêtre martienne oblige - partent en quête de quelque trouvaille à verser au creuset de nos laboratoires ; à défaut de mieux, on s'ingénie à exposer des résultats probants et, conscients du désintérêt d'un grand public captif d'autres exigences, on agit incidemment sur les freins. Pour l'heure et quelles que soient les apparences, tout porte à croire qu'à l'exception d'une poignée de spationautes toujours imperturbables et des baroudeurs de la première heure qui - ont tracé le sentier, notre monde de l'espace, passagèrement stimulé par une question qui a réactivé la petite flamme, traverse une période de latence exempte de toute passion. Malgré les annonces d'intention, la routine est omniprésente ; et le rêve en panne.

Or, sans rêve initial - c'est une antienne - on ne construit rien de bon. Il y a sans doute à cette absence de rêve - ou plutôt, à cette altération du rêve - d'excellentes raisons. Si, depuis bientôt cinquante ans, on n'a pas obtenu l'adhésion des foules, c'est assurément du, pour partie, à l'appréhension de la nouveauté, à l'immensité du domaine concerné, à l'exagération de ce type de grand large, mais surtout - et on en retiendra pour preuve le ravissement de l'interlocuteur dès qu'on lui fournit un repère secourable - à un défaut fondamental d'analyse et d'exposition, autrement dit, à un défaut de fondation. Or, sans fondations - autre antienne - tout édifice est fragile. Spoutnik et sa réplique américaine nous sont tombés sur les épaules à l'occasion d'un combat de vauriens qui ne s'intéressaient qu'à un aspect assez rudimentaire des choses : tenir le haut du pavé. Et si, à défaut de rêve initial, nous n'avons rien construit de bon dans le coeur des individus qui constituent le grand nombre, la raison en est sans doute que le combat de vauriens ne nous a pas laissé le temps de jalonner l'itinéraire, nous a dispensé de labour préalable, de littérature spatiale (jouet d'une évidente redondance de facilités), de théâtre (inexistant) et, j'y viens, de philosophie, avec tous les ingrédients sans lesquels il ne saurait y avoir de culture durable. En un mot comme en mille, nous avons mis la charrue avant les boeufs.
Tout le monde à ce jour est à même de constater que, dans le cénacle de l'espace, parmi tous ces hommes et ces femmes de qualité, et tous ces volontaires déterminés, la chaire de philosophie est désespérément vacante. Crainte ou vertige ? Le résultat est accablant: face à cet immense chantier, pas une thèse en Sorbonne.


Et, ceci découlant de cela, les conséquences de notre quête lointaine n'ont encore donné lieu qu'à des appréciations superficielles.


De même, l'événement intervenu il y a près d'un demi-siècle - c'est là son originalité mais on ne la lui a jamais accordée - se distingue de quantité d'autres événements autrement importants en ceci qu'il autorise - acte fondateur - un spécimen privilégié du phénomène biologique local à s'extraire de sa sphère nourricière pour s'aventurer en d'autres lieux.


De plus, l'épisode en question - mais cette qualité ne lui est pas reconnue davantage - se présente sous le jour d'un résultat, d'un dénouement évolutif qui, avant d'aboutir, a mobilisé l'ensemble des phénomènes - avatars et échecs - survenus à bord de notre planète pendant des milliards d'années.


Enfin, et en confirmation de ce qui précède, la prise de conscience de « l'événement », de « l'épisode » ou du « phénomène » tel qu'il nous est donné de le répertorier est encore embryonnaire dans nos esprits encombrés de mythes et de fondements dogmatiques.
Une réflexion s'impose. La philosophie - j'y reviens - la science des êtres des principes et des causes, de leurs connexions et de leurs effets, selon toute bonne définition, devrait pouvoir nous sortir de l'ornière. Les gens habituellement chargés de ce genre d'exercice nous rejoindront-ils sur nos trajectoires ? C'est souhaitable, car nous sommes bel et bien condamnés à un effort de pensée original appliqué à l'espace et au temps jusqu'aux extrêmes limites du vivant. Le bonheur veut que, dans notre hexagone, les hommes et les femmes en situation de veille - et, dieu merci, bon nombre également de ceux et celles qui nous prêtent une oreille attentive - sont acquis à cette science des principes et des causes née dans le monde grec il y a deux mille cinq cents ans. Cette aptitude leur a permis, au fil des ans, d'émerger à l'occasion de nombreuses dérives. Depuis un certain temps déjà, ils se gardent des opinions indécises formulées dans un langage abstrait conduisant à tous les scepticismes et se contentent d'observer et d'expérimenter. On est même en droit de penser que, depuis une douzaine de décennies ou à peu près, dans les contrées où l'éducation a été rendue obligatoire - et il y a là une promesse tout à fait rassurante - ils observent et entendent avec une efficacité exemplaire. « Il n'est d'évolution que sous contrainte », dit-on non sans raison.. Dans notre ciel-archipel dorénavant accessible, des particules s'agrègent sans fin à d'autres particules - c'est la loi du mouvement - les agrégats deviennent des étoiles et, après diverses transformations, retournent à l'état de poussière ou de naines décaties. Le phénomène remplace le mythe et pour fêter l'événement, nous buvons à la santé de Démocrite.


Sur une période plus réduite et en aperçu de ce qui nous attend, observons aussi que, de Lucy qui a franchi l' Omo pour nous permettre de devenir ce que nous sommes à nos contemporains - Yang, Armstrong, Gagarine - défricheurs de l'espace, pressions et potentiels ont également généré dans notre morphologie et dans nos textures intimes des modifications qui, bien que profondes, n'en sont pas moins modiques par rapport à celles qui seront générées dans un avenir à haut degré de complexité sur une durée identique; soit quelques millions d'années, le temps nécessaire pour émerger de notre galaxie.


Comme on peut le constater, le philosophe que j'invite non sans quelque légèreté à se manifester en Sorbonne dispose déjà d'une bonne réserve de grain à moudre dans nos greniers. Et d'abord, la question que voici : « à quoi bon l'espace ? » Parmi toutes les questions qui figurent au répertoire, c'est celle qui revient le plus souvent. A quoi bon un effort aussi colossal, à quoi bon cette quête dans un domaine réputé minéral, haut lieu de tous les excès de rayonnement, de chaleur et de froidure impliquant la mise en oeuvre de tout un arsenal d'artifices et de protections ? A quoi bon, êtres insensés - nous est-il objecté - alors qu'il y a tant de lapins qui courent dans les buissons, tant de bergères sous les pommiers ? Pris au premier degré, il est vrai que le sujet mérite réflexion. Qui, parmi nous, hormis les châtrés, se dispenserait d'une espérance aussi épanouissante, qui n'a rêvé d'une bergère, ou d'un berger, Mesdames, sous les pommiers ?


Avec cinquante ans de recul, l'heure est sans doute venue d'aller plus avant dans l'analyse des virtualités ouvertes par notre capacité à lancer des véhicules spatiaux, à infléchir des trajectoires, à découvrir des corps célestes comparables au nôtre et, ce faisant, à rejoindre bergers et bergères sous les arbres fruitiers d'une tradition rénovée. C'est, on en conviendra, d'une autre venue que le « loft » de notre petit écran.


Sans doute la démesure qui nous est offerte conduit-elle à une réflexion incommodante, mais l'ampleur de la tâche ne doit pas nous dispenser de la saine dialectique qui vérifie nos origines et consolide notre destin.

Georges Ballini

Romancier.

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  • News : le débat Hubble.
 
 

Que penser de la décision de ne pas réaliser un vol de navette pour une dernière maintenance au bénéfice du télescope spatial ? Nous ferons simplement quelques remarques sur cette question.


• Il est vrai qu’à la suite du rapport de la Commission Gehman sur l’accident de Columbia de nombreuses contraintes vont opérer sur les vols des navettes. Cette mission d’entretien vers Hubble, intervenant afin de prolonger sa vie de quelques années, ne serait pas sans conséquences techniques et financières sur un Système de Transport Spatial dont l’Agence souhaite se séparer en regard de ses nouveaux objectifs.


• Après la moisson scientifique de Hubble, une pause de quelques années, tout en permettant de travailler sur les résultats acquis, ne serait pas dramatique.


• Si l’initiative du Président Bush se réalise, la Lune serait accessible aux scientifiques entre 2015 et 2020. L’installation de toutes sortes de téléscopes sur notre satellite naturel, avec de meilleures conditions et une efficacité améliorée serait possible.


• Dans un commentaire dans la revue Space News du 9 Février 2004, Robert Zubrin soulèva une question intéressante : Comment la NASA peut-elle ne pas vouloir assurer la mission de réparation de Hubble pour des raisons de sécurité et prétendre par ailleurs envisager des missions pilotées vers la Lune ou Mars, destinations vers lesquelles les risques sont plus importants ?! Le Président de Mars Society souligne ce paradoxe en demandant que l’Agence accepte les risques et les prix impartis pour ces entreprises : « … La recherche pour la vérité incorpore nécessairement de périlleuses activités dans l’espace – soit sur Hubble ou sur Mars, rien de grand n’a jamais été accompli sans courage. Si nous abandonnons le courage, nous tournons notre dos à tout ce qui mérite célébration dans notre civilisation … ». Tout en étant pleinement d’accord avec cette mise en garde sur les conséquences d’un « principe de précaution » paralysant progressivement toutes les actions humaines et contraire à celui qui les guida dans l’histoire, nous pensons que l’aspect budgetaire très tendu des programmes, imposé par des concepts financiers aberrants, est la cause première des maux grevant toutes les ambitions. Et ces pressions, loin de s’alléger pèsent de plus en plus sur l’avenir des desseins mondiaux dans l’espace.


Nous concluerons en disant qu’une Initiative Spatiale a été proposée par l’Executif à la Nation Américaine. Que la politique générale conduite par cette Administration puisse être discutée, que cette vision de l’exploration de l’espace ne se fasse pas dans le sens souhaité, toujours est-il qu’elle a le mérite d’exister ! Vouloir la casser, l’ignorer ou lui opposer une usure politique, non seulement ne sauvera pas les programmes scientifiques automatiques, mais risque de nous ramener au « marais intellectuel » des années 1990. C’est à partir de cette proposition qu’il faut forcer à la construction d’un débouché global vers l’espace.

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