NSS
FRANCE
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La
lettre N°7 - Février 2004 |
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Sommaire |
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Certains
pensaient que l’espace habitée n’avait aucun avenir,
c’est désormais contredit. George W. Bush a finalement annoncé
mercredi 14 janvier 2004, les nouveaux plans pour la NASA : La lune puis
Mars comme buts d’une politique spatiale habitée ambitieuse
mais raisonnable. Première réponse de l'asssociation. Quelle
place y a t'il pour l'Europe ? |
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Le
15 janvier 2004, au Quartier Général de la NASA à
Washington, le Président Bush présenta l’Initiative
Spatiale préparée par son Administration. En dehors de tout
contexte lié au processus électoral, nous pensons que cette
proposition est la bienvenue. Cependant de nombreux points restent à
définir, et nous les découvrirons au fil du temps. Dans
ces grandes lignes la stratégie présentée est jouable,
avec de bonnes chances de succès et dans un calendrier acceptable.
Quelques aspects semblent intéressants à relever. |
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Dans
un premier article paru dans la Lettre de la NSS France, nous avions décrit
un certain nombre de projets de centrales solaires spatiales gigantesques
qui avaient été proposées par le passé et
qui n'étaient pas vraiment réalistes étant donné
que la stratégie suivie faisait l'impasse sur l'étape préliminaire
et incontournable de l'industrialisation lunaire : cette impasse était
notamment le cas des études menées par la société
Boeing qui, en Février 1978, avaient proposées au Président
Jimmy Carter un projet de centrale solaire géante d'une trentaine
de kilomètres de long sur 6 kilomètres de large pour un
poids de 110000 tonnes qui, à l'aide de 14 milliards de cellules
solaires assurerait la transformation de l'énergie solaire en électricité. |
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Lors
de la réunion des 5 et 6 Novembre 2003, des décisions dommageables
pour la crédibilité du programme scientifique de l’ESA
ont été prises par son SPC (Comité du Programme Scientifique)
: ces mesures touchent la sonde Eddington, chargée d’effectuer
des études d’astroséismologie et de détecter
des planètes habitables de type terrestre, et qui a été
abandonnée, et le projet de sonde mercurienne Beppi Colombo qui
se voit privé d’une de ses fonctions essentielles avec l’abandon
de son atterrisseur qui était la partie la plus significative de
la mission. |
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Pendant
que l’Europe ronronne dans ses politiques de proximité et
à l’abri de ses certitudes, et aux Etats-Unis ce n’est
guère mieux, les sites américains spécialisés
d’Internet discutent à propos de l’espace habité.
De nombreux intervenants de ces débats sont issus ou gravitent
autour de la dynamique « Space Frontier Foundation ». Les
objectifs de cette association sont les mêmes que ceux de la «
National Space Society » : une civilisation étendant ses
activités à l’espace, les différences résident
dans les concepts économiques utilisés. Pour la première,
le Privé, l’Entreprise le Marché sont capables de
tout réaliser ; La NSS France, pense que la démarche utilisée
par le président Kennedy avec Apollo, dans laquelle un Pouvoir
Politique a une idée et la fait réaliser par le Privé
afin de créer des potentiels qui n’existaient pas avant,
reste le concept adéquat pour atteindre un objectif |
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Trois articles récents
ont attiré l’attention de la National Space Society France. |
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Peut-on se proclamer
athée par les temps qui courent ? Ce « a » privatif
offusque le bon sens comme un défaut de liberté. Appliqué
à un domaine qui fait une aussi grande place à l’interrogation,
il a quelque chose d’indécent. Maintenant que le ciel –
le ciel physique - est ouvert à nos investigations dorénavant
sans limites, ce « a » coupe court à tout questionnement
constructif. Or il est évident que les milliers de générations
qui vont nous succéder dans le domaine de l’espace enrichiront
notre savoir positif. A la lumière des découvertes et confrontations
qui nous attendent, de labos en labos et de corps célestes en corps
célestes, l’agnosticisme est promis à des rebondissements
innombrables. Entre la réalité globale et la connaissance
répertoriée, la limite s’amenuise de jour en jour.
A l’échelle de l’univers, tout n’est qu’évolution
sous les formes les plus diverses, tout n’est que mouvement. Tel
jugement établi en un matin naissant tourne au préjugé
avant que le jour ne s’achève. ... |
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Certains
pensaient que l’espace habitée n’avait aucun avenir,
c’est désormais contredit. George W. Bush a finalement annoncé
mercredi 14 janvier 2004, les nouveaux plans pour la NASA : La lune puis
Mars comme buts d’une politique spatiale habitée ambitieuse
mais raisonnable.
Un homme politique doit parfois prendre la responsabilité de doter son pays d’une vision, claire et lointaine. Depuis un an, la NASA doutait de son avenir, alors bloqué à l’orbite basse. Le débat sur Science Driven Vs Destination Driven nous rappelait alors l’impasse dans laquelle se trouvait l’agence. L’avenir est une affaire trop sérieuse pour être laissée aux scientifiques et gestionnaires d’agences spatiales. Trop souvent ceux qui sont en charge des destinées des pays ont laissé les décisions importantes se prendre aux seins d’administrations dont ce n’est pas le rôle. Nous connaissons le résultat de ce genre d’aberrations: Des intérêts divers et particuliers, des concepts économiques réducteurs, des groupes de pression s’emparant du débat, cela a pour conséquence bien souvent un blocage et une inefficacité dans l’évolution des programmes, les finalités sont perdues de vue. Les grands espoirs d’un avenir intéressant se perdent dans le marais de l’empirisme financier et médiatique. Heureusement, l’espace habité revient sur le champ politique de façon inattendue dans un discours de G. W. Bush, ce mercredi 14 janvier, organisé au siège de la NASA à Washington DC. Depuis les résultats de la commission Gehman (CAIB) rendus au début de l’automne, la NASA était mise en cause pour son manque de vision à long terme. Tous les intéressés de l’espace habité (NSS, Space Foundation, Mars Society, ou Moon Society) avaient participé à des auditions cet été au Congrès afin de donner leur avis sur la politique de l’agence. Dans un article de Frank Sietzen Jr. paru sur Spaceref.com ‘’Beyond the Moon, inside Bush’s space plan’’, on apprend que Georges W. Bush dès Novembre 2001 avait demandé à son vice-président et à son nouvel administrateur de se projeter au-delà de l’ISS pour lui proposer un plan concernant l’espace habité. Vint le tragique accident de Columbia en février 2003 puis les débats sans fin de réorganisation de l’agence. La CAIB de l’amiral Gehman mettait en valeur, avec d’autres témoignages de hautes personnalités du Capitol, le manque de dimension politique et de planification à long terme de la NASA. La National Space Society américaine avait souligné, lors de son audition, l’omission de projets post-ISS, tout en soulevant l’absence de soutien à ce genre de projet. Brian Chase depuis plus d’un an, comme directeur exécutif de la NSS rencontrait les parlementaires pour leur vanter les mérites d’un programme spatial habité ambitieux. La National Space Society France joint donc ses félicitations à celles de l’association américaine au Président américain. D’un point de vue strictement politique, le discours intitulé ‘’renouveler l’esprit de découverte’’ (Renewed the spirit of discovery) est une avancée majeure pour l’espace habité. La NSS France n’a jamais particulièrement soutenu la présidence de G.W. Bush ; nous avons toujours été critiques, mais il s’agit de voir au-delà des a priori. M. Bush eut le mérite de présenter un programme spatial habité ambitieux mais raisonnable, projet par ailleurs tabou dans certains milieux médiatiques, politiques et scientifiques. Nous insistons aussi sur la mise en perspective d’un choix de société dans le futur. Si beaucoup de commentateurs et spécialistes parlent d’un discours opportuniste, au contraire nous affirmons que l’espace habité doit devenir un thème politique à part entière, au même titre que l’Insécurité, la Santé ou le social, l’éducation ou l’environnement. Introduire ce thème au centre des débats philosophiques et politiques, c’est aborder le sujet de l’avenir de la Démocratie et de nos sociétés. Mais que cela ne reste pas aux mains d’une caste de spécialistes empiristes et scientifiques obtus ! Tous les médias ont relevé que ce discours avait été réalisé en vue de la campagne présidentielle : c’est d’autant mieux pour les discussions et les critiques qui vont en découler. Les élections constituent des périodes où les idées sont les plus débattues, et où les projets sont soumis au vote d’une Nation. Que les démocrates ou les opposants conservateurs républicains de M. Bush argumentent et critiquent ! Ou mieux : qu’ils fassent d’autres propositions concrètes allant dans le sens d’une politique spatiale habitée. Redonner une vision d’avenir aux citoyens, tel doit être le but de tout homme politique de ces deux cotés de l’Atlantique. Le mutisme politique auquel nous assistions sur le sujet depuis des années à Washington DC et encore maintenant à Paris changera peut-être…. La National Space Society France est optimiste mais le travail de destruction de la part de certains médias, et des responsables Européens ou Américains a déjà commencé et s’amplifiera ces prochains jours. D’un point de vue technique, nous ne voyons pas d’erreurs fondamentales dans le plan énoncé. N’en déplaise aux partisans de Mars Direct, qui semblent parfois oublier les écrits de milliers d’auteurs et spécialistes de la Lune comme étape fondamentale pour la maîtrise des techniques de vols interplanétaires et d’habitat en milieu extraterrestre. Le retour sur la Lune est raisonnable et nécessaire comme étape logique d’une civilisation tournée vers les étoiles. Il est acceptable de penser que les Etats-Unis et la NASA ont eu tort, durant l’été 1961, de soutenir le vol direct vers la lune et qu’il aurait plus adéquat de passer par une Station pour ensuite atteindre la Lune. W. Von Braun disait dans une interview que cette étape aurait pu inscrire durablement les vols lunaires des années soixante dans une perspective de conquête de l’espace. La course avec une date limite favorisa la solution directe. L’étape lunaire, aujourd’hui, est donc positive, et permettra de tester (pour un Homme politique qui soutiendra le projet) la capacité des Etats-Unis à aller plus loin. Robert Zubrin part du postulat que le système financier actuel ne soutiendra pas un programme spatial ambitieux. Son élégante option ‘’Mars Direct’’ en est la conséquence. Puisque ce postulat induit ailleurs que dans le spatial des contraintes inacceptables humainement, la NSS France pense que l’inflexion politique de ce système financier doit être obtenue afin que l’espace habité et d’autres espoirs puissent se développer. En conséquence un plan d’extension dans l’espace doit être envisagé de façon progressif et classique. L’option‘’renouveler l’esprit de découverte’’, si elle est respectée, permettra d’inscrire la future politique spatiale dans le long terme, tout en visant Mars et les mondes au delà. Sans polémiquer autour du débat ‘’Mars or Moon first ’’, La National Space Society France a apprécié entendre évoquer les plans de développement et d’industrialisation de la Lune (les termes : Harness Moon’s aboundant ressources) – tirés des auditions sénatoriales de David Criswell, spécialiste de l’université de Houston, concernant les ressources lunaires : La Lune utilisée comme port et pôle industriel et scientifique pour les prochaines missions habitées servira de zone de recherche et développement. Nous souhaiterions tout de même savoir comment va être organisée la planification du prochain véhicule de l’agence (CEV ou OSP). Trois questions vont revenir constamment dans le débat à propos du discours du président des Etats-Unis : le volet financier, pour certains, c’est trop, pour d’autres, trop modeste ; le volet stratégique, ou intitulé les intentions cachées des USA face au monde ; enfin l’aspect électoraliste.
2. Certains commentateurs politiques ont déjà commencé à prêter des intentions politiciennes cachées au discours de G. W. Bush – en deux mots : les USA se lanceraient dans ce programme, après avoir été humiliés par le tragique échec de Columbia, puis s’être faits ‘’doubler’’ par les chinois, afin de se rassurer et de maintenir un leadership spatial – La NSS France ne croit pas que les Etats-Unis aient besoin de réaffirmer leur puissance spatiale. Nous tenons ici, à relativiser encore une fois le succès des chinois en octobre dernier. Les chinois ne sont pas près d’aller sur la Lune, encore moins sur Mars alors que les Américains, en donnant un sérieux coup de fouet à leurs programmes, pourraient poser un Homme sur Mars d’ici 2015 (dixit C. Frankel sur LCI ou la Mars Society). Il n’y a pas de problème chinois ou européen pour les USA. Il a clairement été énoncé que ce n’est pas une course mais un voyage. Le Président américain a peut-être besoin de réaffirmer la puissance spatiale des Etats-Unis, d’un point de vue national mais certainement pas d’un point de vue international. D’ailleurs ce dernier, s’est exprimé le mercredi 14 janvier, en des termes très américains en citant : l’esprit américain de conquête et de découverte, le terme de frontière, l’exemple de Lewis et Clark, La destinée des êtres humains dans le cosmos (Humans Beings are headed into the Cosmos). Beaucoup se moquent d’expressions intitulées ‘’de mystiques’’ (LCI) mais ce sont des termes qui ont un vrai sens aux Etats-Unis. Méfions nous des différences de langage et gardons-nous de ne juger que la signification des propos. M. Bush a cité ces générations d’innovateurs, de pionniers et ces étudiants en mathématiques incités par les découvertes qui seront faites : c’est un signe et un discours, avant tout, pour le peuple américain. Pourtant la conclusion reste mondiale : ''c’est un sujet qui est important pour notre pays et pour le Monde (…) les êtres humains tendront vers le cosmos…''
Alors, que peut faire l’Europe et comment peut se positionner l’agence spatiale européenne face au défi politique américain ? Notons, avant tout, aucune déclaration de personnalités politiques françaises, ni du Ministre de la Recherche, ni du Premier Ministre, ni même M. Jacques Chirac. Il existait une parabole orientale qui disait que le sage montre l’astre du doigt, l’ingénu regarde le doigt. Cette parabole est hélas d’actualité depuis les journaux télévisés de jeudi 15 janvier sur France 2 ou TF1, où Jean Jacques Dordain s’interrogeait sur les modalités de la participation européenne à l’ISS et aux projets internationaux. M. Bush montre la Lune puis Mars, messieurs les Européens ne font que regarder l’ISS ou des modalités administratives diverses sur leurs petites expériences scientifiques dans telles ou telles sondes. La grande question dans les agences européennes lorsque M. Bush demanda que les participants de l’ISS se chargent de la station après 2010 fut : ‘’allons-nous faire ça tout seuls ?’’ le directeur général de l’ESA lançant même à la presse que cela se réglerait lors de la réunion des participants à l’ISS dans quelques mois. L’Europe, ni aucun dirigeant politique n’ont pris conscience de l’initiative du président Bush. Claudie Haigneré a tout de même déclaré au Figaro, dans un sursaut d’ambition, que l'exploration par l'homme est inscrite dans toute politique spatiale. Des réponses forcées, convenues et pas très volontaires. L’Europe politique a perdu l’initiative depuis cette date. À croire que personne n’avait prévu le coup en Europe, M. Dordain compte faire une réunion avec les commissaires européens pour définir une position ! On ne parle pas d’initiative mais de coopération dans les trous que nous laisse la NASA (l’ATV pourrait être utilisé entre 2010-2014 !). Bien faible position européenne qui ne fait que suivre le rythme donné par les Etats-Unis. La Commission Européenne réagit par l’intermédiaire de M. Busquin qui se pose des questions concernant la participation des Américains aux grands programmes internationaux. M. Philippe Busquin finit son interview en rappelant que la Commission a sorti le White Paper qui se veut passer pour une déclaration d’intention dans le but d’une politique spatiale européenne ambitieuse. Mais le thème de ce papier porte sur des robots-sonde, de la télé-opération sur l’ISS, la sécurité et la défense. La National Space Society France ne demande pas à ce que l’Europe s’aligne vulgairement sur la déclaration de G.W. Bush, mais qu’elle s’engage sincèrement dans une politique spatiale habitée ambitieuse, en comprenant toutes les composantes et retombées d’un projet comme celui-ci. Une opportunité s’est ouverte aux Etats-Unis, profitons en ; engageons nous tant qu’il est encore temps ! L’Europe a les capacités techniques, économiques et politiques de faire un programme spatial habité ambitieux. Que cela soit grâce à Aurora, aux travaux du professeur Koelle ou aux 15 propositions sur 5 ans proposées par la National Space Society France, ceci peut être sujet à débat et faire l’objet de l’attention d’une Commission Européenne qui cherche ses temps-ci à redynamiser l’économie par de grands projets. Romano Prodi ou Erkki Liikanen et même Philipe Busquin semblent avoir compris que de lancer des grands projets d’infrastructure ou de recherche fondamentale pourraient apporter un élément positif à l’économie de notre vieux continent. Mais que de paradoxes, en Europe ! Un programme spatial habité est le summum de cet investissement sur le long terme. Investir dans l’espace c’est construire le reste de la pyramide technologique et économique. C’est aussi donner une impulsion forte à la Recherche et à l’innovation. La déclaration de G. W. Bush finalement doit être accueillie avec enthousiasme et soutenue. Ce discours marque le grand retour (depuis 10 ans) de l’espace habité et de projets à long terme dans la politique. S’investir sur ce sujet à la veille d’une élection est certes profitable, pour une nation qui peut douter de l’action de son dirigeant sur le plan international, mais est surtout positif d’un point de vue national car la NASA a enfin des buts clairement définis, et la République américaine se dote d’une vision pour sa Société dans l’avenir. Par ailleurs les premières réorganisations au sein de l’agence ne se font pas attendre. Selon le Président, le financement se fera en fonction des buts atteints. Un bureau de l’exploration du système solaire vient d’être créé à la NASA que l’ancien amiral Aldridge vient diriger. Il prendra place à côté de l’administrateur O’Keefe comme adjoint afin de gérer les volontés présidentielles. La National Space Society suivra le dossier afin de voir si les promesses politiques seront tenues. Drôle de pirouette pour un administrateur qui se faisait le chantre du Science Driven, il y a un an et qui maintenant doit orienter la politique de son agence dans la direction du Destination Driven. John Logsdon aux Etats-Unis, comprend le revirement de situation par le fait que l’agence ne possédait pas de plan à long terme, comme l’ESA peut en avoir un avec Aurora ; l’agence spatiale américaine selon le président du Space Policy Institute devait forcement se contenter de développer des technologies sans but précis. L’Europe a donc la chance d’avoir un plan à long terme qu’elle pourrait redynamiser rapidement avec des propositions concrètes et rapides comme nous en avons déjà proposées. L’Europe et ses hommes politiques se réveilleront-ils un jour ?
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Le
15 janvier 2004, au Quartier Général de la NASA à
Washington, le Président Bush présenta l’Initiative
Spatiale préparée par son Administration. En dehors de tout
contexte lié au processus électoral, nous pensons que cette
proposition est la bienvenue. Cependant de nombreux points restent à
définir, et nous les découvrirons au fil du temps. Dans
ces grandes lignes la stratégie présentée est jouable,
avec de bonnes chances de succès et dans un calendrier acceptable.
Quelques aspects semblent intéressants à relever :
• Un intérêt uniquement scientifique pour l’espace, poussait certains à ne voir dans ce milieu qu’un vaste laboratoire où il ne suffisait que de faire circuler des sondes automatiques afin d’y réaliser des analyses ou des relevés. Ce monopole du savant semble remis à sa juste place par cette Initiative. En effet comme à l’époque des grandes explorations, la science n’est qu’une des opportunités d’aller ailleurs. Les activités économiques, commerciales, culturelles, la part du rêve et l’espoir que chaque individu cultive, sont également pris en compte dans cette initiative américaine. • Contrairement à ce que beaucoup arrivent à penser depuis une quarantaine d’années, l’Humain est la richesse et la spécificité de la Terre (tout démarre avec lui et aboutit à lui), et cette Initiative fait ressortir une participation harmonieuse entre l’homme et les machines automatiques. L’envoi d’hommes et de femmes sur la Lune ou sur Mars pour y rester entraîne une dynamique technologique forçant à mettre en marche une immense coalition d’activités scientifiques, culturelles et techniques. Ce large front de travaux et leurs interactions, dans tous les domaines nécessaires pour faire vivre et œuvrer des humains dans un milieu difficile, est générateur de progrès et d’innovations, se diffusant dans les sociétés au travers de divers processus, permettant à tous l’espoir d’un avenir décent. L’expédition de sondes comme « Pathfinder » ou « Spirit », que nous savons faire depuis quarante ans, impliquent peu de travaux et un effort technologique minimum (encore plus avec un concept comme « faster, cheaper and better »). Ce que fait « Spirit » sur Mars est intéressant, mais rien n’égalera la présence d’une équipe de scientifiques incluse dans un programme humain global sur cette planète, afin d’exploiter toutes les occasions offertes à l’intelligence et à l’imagination in-situ. Proposer une base sur la Lune avec une vingtaine de personnes pouvant y vivre et y travailler efficacement, actuellement nous ne savons pas le faire. Relever ce défi exige un effort de mobilisation scientifique et technique immense embrassant toutes les activités. Cette dynamique favorise, mieux que n’importe quel programme terrien « humanitaire » et étroit, l’émergence d’une nouvelle sphère de potentialités au bénéfice de tous. • La station spatiale internationale sera terminée ; reste à savoir à quel stade ? Celui prévu à l’origine du projet défini en 1993, ou au niveau intermédiaire dit : « core station » ? Notons aussi qu’une des missions fondamentales, celle consistant à étudier l’homme dans l’espace est réaffirmée. L’initiative spatiale présente la base lunaire, entre autres choses, comme un moyen de se préparer à aller plus loin, et cela est incontournable, mais une infrastructure spatiale en orbite basse autour de la Terre demeure également impérative pour une civilisation voulant essaimer dans le Système Solaire. Par exemple le franchissement de l’atmophère terrestre entraîne des spécificités fondamentalement différentes de celles de la propulsion dans le vide sidéral. Si l’on veut accroître efficacement le trafic entre ces deux milieux, l’idée d’un port intermédiaire aux confins de l’atmosphère, avant que nous ayons inventé un système de propulsion universel, n’est pas idiote. • Devons nous aller directement sur Mars ou faire un crochet par notre satellite naturel avant d’atteindre la Planète Rouge ? Pour la NSS France, c’est un faux débat ! Si l’on va sur Mars pour y faire autre chose qu’y planter un drapeau, donc au moins une base scientifique, suivie, espérons-le d’une colonie en croissance, il serait aberrant de ne pas utiliser la Lune pour soutenir la logistique spatiale appuyant cette stratégie. D’un autre côté le satellite naturel de la Terre, contrairement à ce que pense certains n’est pas « has been » ou une étape inutile, c’est une autre « île » dans l’espace – très bien placée – avec toute une palette d’opportunités scientifiques, économiques, techniques, logistiques, culturelles et de loisirs. L’ignorer ou ne pas exploiter ces possibilités serait aussi stupide que d’y rester indéfiniment. • Quels que soient nos désaccords sur des choix antérieurs en politique, nous remercions le Président des Etats-Unis d’avoir présenté cette Initiative Spatiale, car elle nous tient à cœur pour des raisons philosophiques, humanistes, économiques et culturelles. La mettre en avant, comme il le fit le 15 janvier, n’était pas facile et loin d’être démagogique. Maintenant cela débouchera-t-il sur du concret ? Le Congrès acceptera-t-il de soutenir cette vision qui s’étend dans le long terme ? L’avenir le dira, mais l’hypothèse d’un futur pour l’humanité dans l’espace a été exprimée haut et fort, à nous d’en être les vivants rappels. La réaction des milieux médiatiques et financiers, comme il fallait s’y attendre, s’étend du soutien parcimonieux à une profusion de propos superficiels en passant par l’hostilité. Tout d’abord, l’accusation de boniments électoralistes ne nous concerne pas puisque nous pensons que c’est le rôle d’un homme politique de faire des propositions. Par contre avec peu d’imagination et beaucoup de cynisme ces mêmes milieux se préparent à rejouer la comédie produite lors de la présentation du projet du père de l’actuel Président en 1989. Pour l’anniversaire d’Apollo 11, George Bush proposait une « Initiative d’Exploration Spatiale ». Ce dessein, étendu sur 30 années, suivait le même cheminement que le schéma d’aujourd’hui : station, retour sur la Lune puis Mars ; puis il fut appuyé par une étude dont nous pouvons encore trouver le résumé dans un rapport intitulé « America at the threshold » paru en 1991. Mais les média et leurs spécialistes ainsi que le Congrès, rapidement, superficiellement, se moquèrent et décrétèrent que tout cela coûterait, au bas mot, 450 milliards de dollars, en omettant de préciser que le programme s’étalait sur trente années ! Alors le Président fit un repli tactique, défendant à peine sa proposition ; à cela s’ajouta les événements à l’Est ainsi que l’affaire irakienne qui orientèrent son mandat vers d’autres choix. La NASA et son administrateur se retrouvèrent seuls à essuyer les quolibets. Afin de relativiser les chiffres nous remarquerons que 450 milliards de dollars sur trente ans cela revient à 15 milliards par an, soit à quelques variables près, approximativement le budget annuel de l’Agence Spatiale Américaine depuis quelque temps. 450 milliards de dollars c’est aussi le budget annuel de l’Armée Amércaine, toutes opérations extérieures incluses ! Depuis le discours du 15 janvier la machine à détruire se remet en place. Je vous épargnerai l’énumération des articles empiriques et pessimistes sur le sujet ; mais pour le venin littéraire Viziane de Vezins avec son éditorial « Les bookmakers ne croient ni à la Lune ni à Mars » dans le Figaro du 17 janvier reste indétrônable. Pour l’a priori financier la palme reviendra à un article du « très sérieux » Financial Time : « Critics see ocean of red ink on mission to red planet » daté du 15 janvier 2004, sous la plume de A. Beattie. Le lecteur y apprend : « … Estimates of the Lunar station and crewed Mars mission in their entirety range up to a $1000 bn … ». bonté divine, deux fois plus qu’en 1989 ! Vu sous cet angle, jamais l’humain n’aurait rien entrepris !! Une bonne manière de résister à la douche froide des « spécialistes » médiatico-financiers est d’aller à la biblothèque municipale de votre ville et d’y lire les articles d’Albert Ducrocq, que vous pouvez glaner dans la Grande Presse entre 1960 et 1965, à propos de la conquête spatiale, vous y verrez qu’il existe d’autres manières d’aborder le sujet. •
Enfin l’argument consistant à dire qu’il existe bien
des maux à résoudre sur cette Terre avant d’aller
dépenser de l’argent là haut, apparaît également
issu d’une analyse superficielle et empirique sur la véritable
création de richesses. En effet une économie financière,
basée sur le profit immédiat, ne favorisant que des innovations
rapportant au plus vite, réduisant l’humain à un vulgaire
paramètre dans une équation d’économie partant
de postulats aberrants ne peut en aucune façon résoudre
les problèmes actuels de la planète. Seule une économie
en croissance, au service de l’humain, utilisant le progrès,
et espérant un avenir à long terme peut se donner les moyens
de solutionner les difficultés ici bas, et cela passe sans aucune
autre alternative par le développement d’une civilisation
étendant ses activités dans l’espace. Le triptyque
: développement des pays manquant de tout, amélioration
de nos infrastructures, tiré par un puissant programme spatial
habité dans l’intention d’étendre la civilisation,
est indivisible et incontournable. L’utilisation du progrès,
un soutien financier indéfectible, le rendront concret tout en
produisant ces richesses tant espérées ; l’ensemble
assurera un avenir décent à tous. • Cette Initiative Spatiale Américaine est sur la table, il faut la soutenir, elle est fondamentale et optimiste pour le futur. Quelle que soit l’issue électorale, l’homme qui dirigera les Etats-Unis devra se positionner par rapport à elle. En admettant qu’il l’ignore, cette hypothèse spatiale le rattrapera régulièrement comme la seule alternative Humaine pour la planète. Et l’Europe ! Il y a « Aurora », il y a nos « Quinze Propositions » ! Ne rêvons pas, le Président Français et le Commissaire Européen à la recherche n’ont pas encore adhéré à NSS France ! Peu importe, sans soutien politique actif et engagé, Aurora ne restera que de belles images sur Internet. Faire un système GPS, une liaison Lyon Turin en TGV, ou des Autoroutes de la mer, c’est bien, mais ces applications nécessaires devraient déjà être entreprises, de plus elles ne tirent pas la machine à progrès, elles assurent une meilleure gestion dans le marasme actuel, elles n’ouvrent aucun d’avenir. Dès le 16 janvier, l’Europe aurait dû se situer par rapport à l’Initiative Spatiale Américaine, non pas en sous traitant de quelques miettes, ou en y voyant quelques intérêts pour le contrat-piège « Soyouz à Kourou », mais en « amical compétiteur » !
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Dans
un premier article paru dans la Lettre de la NSS France, nous avions décrit
un certain nombre de projets de centrales solaires spatiales gigantesques
qui avaient été proposées par le passé et
qui n'étaient pas vraiment réalistes étant donné
que la stratégie suivie faisait l'impasse sur l'étape préliminaire
et incontournable de l'industrialisation lunaire : cette impasse était
notamment le cas des études menées par la société
Boeing qui, en Février 1978, avaient proposées au Président
Jimmy Carter un projet de centrale solaire géante d'une trentaine
de kilomètres de long sur 6 kilomètres de large pour un
poids de 110000 tonnes qui, à l'aide de 14 milliards de cellules
solaires assurerait la transformation de l'énergie solaire en électricité.
Dans le cadre de ce projet, "tout venait de la Terre" jusqu'au
moindre boulon et la principale réserve émise par les experts
consistait dans le transport des éléments nécessaires
de la surface terrestre vers l'orbite géostationnaire: selon nos
calculs, et sans tenir compte de l'acheminement incompressible de plusieurs
centaines d'astronautes et de la construction des indispensables habitats,
il aurait fallu, pour la construction d'une seule centrale, un millier
de vols de lanceurs lourds de la classe 150-200 tonnes en orbite basse
plus 2750 vols de cargo interorbital. Des projets comme celui de Boeing
eurent au moins le mérite de faire bouger les choses dans le domaine
des études et la plus connue, menée conjointement par la
NASA et le DOE (Département de l'énergie), dénommée
"concept de référence", prévoyait une puissance
totale installée de 300 GW représentant 60 centrales de
5 GW de puissance unitaire (à comparer à un site nucléaire
comme celui de Paluel de 4 tranches de 1,3 GW soit 5,2 GW). La durée
de vie prévue des centrales était de 30 ans et le rythme
d'installation de 2 centrales par an. Pendant longtemps, jusqu'en 1995,
l'étude NASA-DOE restera la référence vis à
vis de laquelle se positionnèrent, et parfois à tort, pratiquement
toutes les études sans faire sauter les verrous en matière
de stratégie spatiale. Dans ce domaine de nouvelles idées
sur cette stratégie, les années 1986-1989 marquent un tournant
intéressant: en 1986 le spécialiste américain Gregg
Maryniak écrivait, après un premier colloque mondial tenu
à Paris sur les centrales solaires à l'initiative de Lucien
Deschamps et Peter Glaser : "Le concept de centrale solaire spatiale
suscite de nouveau un intérêt attractif de par le monde.
Le temps est venu d'effectuer de nouveau des recherches et des développements
sur les centrales énergétiques solaires basées dans
l'espace". Il faut également ajouter que parmi les motivations
pour le solaire spatial existent aussi des préoccupations environnementales
se traduisant par des modèles de réchauffement global dans
le cas où l'on continuerait trop longtemps à maintenir un
système de combinaisons énergétiques basées
sur la consommation de combustibles fossiles: ce risque est réel
mais pourrait contrebalancé par une utilisation judicieuse de l'électronucléaire
s'il n'y avait pas cette peur irrationnelle qui joue contre l'acceptabilité
de cette forme d'énergie.
Aux USA, bien qu'ils aient été recommandés depuis longtemps par Peter Glaser, les premiers travaux consistant à étudier l'option de construire les centrales solaires à partir de matériaux lunaires ont été conduits par le Space Studies Institute de Princeton en collaboration avec la NASA. Peu de temps après le début de cette collaboration, le rapport de la commission nationale présidentielle sur l'espace recommande le développement de techniques faisant appel aux ressources de la Lune et d'autres corps potentiels (astéroïdes) dans le but de monter des constructions dans l'espace. En 1988 le Space Settlement Act, en appendice du NASA Authorization Bill, livre au public l'état d'un grand nombre de discussions relatives à l'utilisation de l'énergie et des ressources en matériaux de l'espace. Il faut mentionner également les travaux de l'International Space University, conduite par le MIT en 1988, avec l'option de mines sur la Lune pour extraire et transformer les matériaux nécessités par la construction d'une centrale solaire SPS et, la même année, se déroula un atelier organisé par le SSI pour examiner les opportunités économiques de l'usage des matériaux lunaires. L'utilisation des matériaux et des ressources de l'espace est également recommandée par Sally Ride et, en 1989, le NASA Office of Exploration, dans son rapport "Beyonds Earths Boundaries" effectue une étude détaillée de l'utilisation des ressources lunaires et des astéroïdes pour les futurs projets spatiaux et, faisant toujours autorité, nous apparaît également l'étude NASA-1989 "Lunar Entreprise Case Study SPS-LPS-He3" Report of NASA Lunar Energy Entreprise Case Study Task Force. De notre point de vue, la meilleure étude est sans conteste celle de la société General Dynamics qui a comparé 4 différents scénarios pour la construction des centrales SPS: reference earth baseline (scénario A), LRU (scénario B), LRU (scénario C), LRU (scénario D). Dans le premier scénario, le véhicule de base de transport à partir de la Terre est un HLLV (500 tonnes en orbite basse), tandis que dans les autres scénarios, on utilise un véhicule SDV (de 200 à 250 tonnes en orbite basse) du fait qu'une grande partie des matériaux utilisés pour les SPS viennent de la Lune. Pour ce qui concerne les véhicules transportant le matériel lunaire vers l'espace, ceux-ci n'existent pas dans le premier scénario (ici tout vient de la Terre) mais sont impératifs pour les trois autres: -pour le LRU scénario B, le traitement des matériaux lunaires s'effectue dans l'espace (au point de Lagrange L2) et le véhicule chargé d'amener de la Lune les matériaux est un accélérateur électromagnétique de masse fonctionnant à l'électricité avec une source qui peut être soit solaire soit nucléaire -pour le LRU scénario C, le lieu de traitement des matériaux s'effectue sur la Lune et le véhicule de lancement de matériel lunaire est une fusée chimique utilisant de l'oxygène et de l'hydrogène importé de la Terre: ce scénario est incontestablement à revoir (suppression des importations d'hydrogène) depuis la découverte de glaces d'eau dans la région des pôles lunaires par la sonde américaine Lunar Prospector. -pour le LRU (scénario D), le lieu de traitement s'effectue aussi à la surface lunaire mais, ici, le véhicule de transport utilise un moteur thermogénîque (Oxygène, aluminium liquides) faisant appel aux ressources de la Lune. Le
rapport de General Dynamics conclut que le scénario B, utilisant
un accélérateur électromagnétique de masse
pour partir de la Lune, permet de construire dans l'espace en minimisant
les coûts et en minimisant les lancements à partir de la
Terre. Allant dans le sens de General Dynamics, d'autres études
ont conclu que le coût de transport serait réduit de près
de 97 % dans le cas où ces centrales seraient fabriquées
avec 99 % de matériaux lunaires. La partie SPS provenant de la
Terre ne saurait être considérée comme un poste fixe
au point de vue du coût: il faut tenir compte de l'amélioration
des systèmes de lancement susceptibles de baisser les coûts,
de l'amélioration et de la baisse des coûts des composants
terrestres des SPS au fur et à mesure du temps puis des économies
d'échelle dues à une fabrication en grand nombre générée
par une demande croissante. Les composants majoritaires lunaires subiraient
également ce phénomène d'économies d'échelle.
Ainsi dans les premières phases de la construction des SPS, l'apport
des éléments lunaires pourrait en faire baisser le coût
de 40 à 50 % par rapport à une centrale construite avec
des éléments terrestres puis passer à une phase de
50-60 % suivie de phases à 80-90 %.Le premier facteur à
prendre en compte, pour bien saisir cette évolution, est le coût
de développement et de construction des fameux lanceurs lourds
chargés d'emmener en orbite basse, avant transfert par des remorqueurs
vers notre satellite, les premiers éléments et les appareillages
nécessaires pour démarrer l'industrie lunaire proprement
dite et les systèmes de protection et de survie pour les astronautes.
A un certain niveau de développement de l'industrie lunaire, on
peut se contenter pour amener le matériel sophistiqué intégrable
aux SPS, de transporteurs spatiaux récupérables abaissant
d'un facteur considérable le coût du kilo en orbite. Le second
facteur à prendre en considération consiste dans le coût
de construction des bases de l'économie lunaire. Mais au bout d'un
certain temps, et du fait que l'économie lunaire puisse subsister
et se développer en limitant les importations en tant que processus
autocumulatif de croissance, le coût des éléments
lunaires pourrait atteindre seulement 10 à 5 % du coût d'une
centrale totalement construite à partir des éléments
terrestres dont nous avons vu que l'option était irréaliste. Deux
orientations furent suggérées: Trois
études américaines sont à prendre en compte , étude
NASA "FreshLook" entre 1995 et 1997, suivie de "Space Solar
Power Concept Définition Study" en 1998 puis, en 1999, d'une
autre étude dénommée SERT (Space Solar Power Exploratory
Research and Technolosy Prosram) L'étude Fresh Look qui fut la
première étude d'ensemble depuis le concept de référence
NASADOE balaya différentes options de solutions nouvelles permettant
diverses gammes de puissances susceptibles de répondre à
une large variété de besoins allant de quelques MW jusqu'à
des puissances susceptibles de répondre à une large variété
de besoins allant de quelques MW jusqu'à des puissances de l’ordre
de plusieurs GW: D'autres études ont été effectuées, avec de petits budgets, par l'agence spatiale canadienne (CSA), l'ESA (qui identifia comme prioritaire le développement de lanceurs lourds susceptibles d'écraser le coût de mise en orbite), le CNES (alimentation en énergie d'une plate-forme spatiale pour des études en microgravité, alimentation en énergie de robots). Le grand défaut de toutes ces études est d'être polarisées sur les seuls aspects technologiques du problème sans introduire franchement ceux-ci dans le cadre d'une véritable colonisation lunaire, seule voie rendant possible la construction de grandes centrales énergétiques en orbite géostationnaire. Il y a une obsession à réduire les coûts de façon à rendre compatibles ces concepts avec un lancement terrestre: de notre point de vue ceci peut être fait par des démonstrateurs mais pas pour une centrale énergétique opérationnelle qui ne peut se réaliser que par le biais des matériaux lunaires. La Lune pourrait également permettre une autre forme d'utilisation de l'énergie solaire qui a été imaginée par David Criswell puis reprise par R.Waldron et qui est dénommée LPS (Lunar Power System): ce système vise à installer des centrales solaires sur la Lune même, en longitude et en latitude, sur chaque face de la Lune éclairée à tour de rôle par le Soleil et qui renverraient l'énergie vers la Terre au moyen de micro-ondes. A cause des mouvements respectifs de la Terre et de la Lune, Le problème de mise en phase directive du faisceau de micro-ondes n'est pas si facile à mettre en oeuvre et Criswell a proposé parallèlement un système de miroirs en orbite terrestre qui permettront d'atteindre de larges étendues cachées de la Terre soumises à la nuit. D'autre part un autre système de miroirs en orbite lunaire pourrait réfléchir un supplément d'énergie solaire vers les capteurs notamment pendant les levers et les couchers de Soleil et les éclipses. Certaines études effectuées sur ce concept par diverses institutions américaines estiment à près de 400000 tonnes le matériel de production qui serait apporté sur la Lune, pour les LPS, pendant les 40 premières années mais, de notre point de vue, il existe des possibilités de réduction de plus de 60 % si est développée une industrie locale lunaire apte à fabriquer les composants et pouvant être utilisée à d'autres moteurs du développement spatial. En effet l'argument de poids de Criswell en faveur des LPS est que l'on trouve sur la Lune tous les matériaux de base nécessaires à la production de cellules solaires. Dans cette logique il n'est pas utile de faire appel à de nouvelles technologies à cause de la composition chimique du sol lunaire. Les roches lunaires contiennent des oxydes de silicium qui peuvent suffire comme matériau de base de ces cellules. Autre avantage, du fait que la gravité lunaire est relativement faible, la surface totale des panneaux pourrait être beaucoup plus élevée que sur Terre. Pour les panneaux situés sur la Lune, l'armature pourra être construite avec le fer et l'aluminium lunaires. Il existe aussi des matériaux et des nodules de verre que l'on pourra utiliser pour fabriquer de la fibre de verre et des éléments en céramique. Selon Criswell, créer un réseau de centrales électriques avec une capacité de 20 milliards de watts coûterait environ 150 milliards de dollars. Toujours selon lui, le prix au kilowatt-heure baisserait par rapport à une centrale conventionnelle et les bénéfices annuels seraient de 1000 milliards de dollars. Quelle que soit la solution choisie pour le solaire spatial ( SPS, LPS, ou centrales polaires de Freeman), sa réussite passe de façon incontournable par l'utilisation des ressources lunaires. Additif-Liste
des grands rendez-vous passés sur les centrales solaires orbitales; |
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Lors
de la réunion des 5 et 6 Novembre 2003, des décisions dommageables
pour la crédibilité du programme scientifique de l’ESA
ont été prises par son SPC (Comité du Programme Scientifique)
: ces mesures touchent la sonde Eddington, chargée d’effectuer
des études d’astroséismologie et de détecter
des planètes habitables de type terrestre, et qui a été
abandonnée, et le projet de sonde mercurienne Beppi Colombo qui
se voit privé d’une de ses fonctions essentielles avec l’abandon
de son atterrisseur qui était la partie la plus significative de
la mission. Au niveau de la direction des programmes scientifiques de
l’ESA c’est la consternation et un certain découragement
qui règnent, de même qu’une certaine inquiétude
pour d’autres programmes déjà engagés et Jean-Jacques
Dordain, directeur de l’ESA, a laissé pointer son amertume
en laissant plus ou moins entendre qu’il avait été
mis devant le fait accompli par le SPC. Jusqu’au ici le programme
scientifique européen, même si de douloureux arbitrages étaient
faits régulièrement pour préférer tel programme
à un autre, avait bénéficié d’une certaine
reprise incontestable malgré quelques années difficiles
où les pouvoirs politiques avaient imposé à l’ESA
une baisse de 5% par an de son budget scientifique. Le programme scientifique
de l’agence est stipulé comme obligatoire pour tous les membres
de l’ESA en vertu de l’article 5 de la convention qui l’a
mise sur les rails au début des années 70. De notre point
de vue le programme scientifique n’est pas ce qui risque d’assécher
les finances de l’Europe spatiale du fait qu’une politique
bien ciblée sur quelques objectifs considérés comme
prioritaires qui ont été autant de réussites. Ainsi,
pour 2003, le budget du programme scientifique européen s’est
élevé à 361 millions d’euros soit 13,5% du
budget total de l’ESA qui se montait à 2,6 milliards d’euros.
Même décidé par le SPC, cette décision dommageable
ne saurait être considérée comme une salade interne
à l’ESA mais comme les conséquences des mécanismes
économiques libéraux qui, non contents de s’attaquer
aux grands programmes technologiques et spatiaux, s’attaquent également
à la Science, aux agences spatiales (baisse également du
budget du CNES en 2003 avec l’abandon de son programme de Netlanders
martiens) en vertu d’une obsession maladive en faveur de résultats
à court terme, vision incompatible avec la nature profonde des
implications de la conquête spatiale. L’abandon d’Eddington
et les restrictions dénaturant la mission Beppi Colombo sont une
honte pour l’Europe et nous ne croyons pas qu’il aurait été
impossible aux pays européens de donner une rallonge à l’ESA
s’il y avait une volonté politique forte. On peut craindre
pour l’avenir des programmes spatiaux européens à
l’heure où l’agence est en crise, où le programme
Ariane V a été ralenti et revu lui aussi en baisse (on ne
parle plus de la version ESC-B à 12 tonnes en orbite GEO) et où
l’évolution économique, résultat de changements
de paradigme effectués dans les années 1975-80, a entraîné
le retournement des politiques dans la Science en faveur de politiques
sectorielles à court terme obsédées par le résultat
immédiat : cette évolution pernicieuse et perverse, accélérée
par la mondialisation et les délocalisations, détruit le
tissu économique et social et sape les bases économiques
financières sur lesquelles on peut construire de grands programmes
scientifiques et technologiques. Pour ce qui concerne Eddington, la décision
risque de disperser des compétences qui étaient apparues
prometteuses lors de la réunion du 9 au 11 avril 2003 à
Palerme (séminaire ‘’structure stellaire et détection
d’exoplanètes habitables’’) : il est acquis pour
la plupart des experts compétents que l’Europe ne pourra
pas mener à bien son programme IRSI-Darwin si elle ne dispose pas
de l’expérience acquise avec Eddington. Dès lors la
voie solitaire mais royale, parce qu’unique, est ouverte pour le
programme américain TPF. Pour l’Europe il reste néanmoins
le programme de satellite COROT (CNES) mais dont les objectifs sont beaucoup
moins ambitieux. Philippe Jamet |
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Pendant
que l’Europe ronronne dans ses politiques de proximité et
à l’abri de ses certitudes, et aux Etats-Unis ce n’est
guère mieux, les sites américains spécialisés
d’Internet discutent à propos de l’espace habité.
De nombreux intervenants de ces débats sont issus ou gravitent
autour de la dynamique « Space Frontier Foundation ». Les
objectifs de cette association sont les mêmes que ceux de la «
National Space Society » : une civilisation étendant ses
activités à l’espace, les différences résident
dans les concepts économiques utilisés. Pour la première,
le Privé, l’Entreprise le Marché sont capables de
tout réaliser ; La NSS France, pense que la démarche utilisée
par le président Kennedy avec Apollo, dans laquelle un Pouvoir
Politique a une idée et la fait réaliser par le Privé
afin de créer des potentiels qui n’existaient pas avant,
reste le concept adéquat pour atteindre un objectif.
Nombre des adeptes de la Libre Entreprise et du Marché veulent réduire la NASA au rôle de l’ex NACA, arrêter les navettes et la station. Ici aussi nous soutenons que cette approche est le meilleur moyen pour ne plus avoir du tout de programme spatial habité ! En effet, le système financier gérant actuellement l’économie mondiale se désintéresse complètement de ce genre d’initiative et s’avère de toute façon inapte à la développer, ainsi que tout autre projet d’infrastructure terrestre, ce n’est pas dans ses concepts. Depuis 1981, les navettes subirent peu d’évolution, ce qui accéléra leur obsolescence, leur exploitation fut et reste toujours soumise aux pressions de ces concepts d’économie financière, et apparemment, elles ne sont pas l’engin idéal pour aller et revenir de l’orbite basse. Mais elles existent et demeurent capables d’exécuter toutes sortes de missions autour de la Terre. Nous ajoutons que ces véhicules furent imaginés pour soutenir un programme spatial ambitieux (voir le Rapport du Space Task Group de septembre 1969) nécessitant des emports de fortes charges ainsi que des constructions sur orbite ; Et malgré les déviations aberrantes qui émaillèrent leur conception et leur construction pendant l’ère Nixon, Ford et Carter, elles assurent correctement ces opérations comme le démontre la construction de la station. Finalement une exploitation adéquate de ces navettes exigeait trois conditions : un rajeunissement régulier en fonction de l’évolution des technologies, un appui économique cohérent comme il doit en exister un à la naissance de chaque nouveau système de transport, et être le soutien d’un programme spatial ambitieux. Avant l’accident de Columbia un « Think Tank » avait estimé qu’il fallait entre 7 et 8 milliards de $ sur 17 ans afin de rajeunir et rendre plus sûr les quatre navettes (soit 470 millions de $ par an, qu’est ce en regard par exemple du budget militaire !). Si ces améliorations étaient entreprises, elles permettraient de poursuivre le montage de la station, et soulageraient les choix pour l’Orbital Space Plane, quoique ici les contraintes viennent plutôt du côté russe avec la production des Soyouz. Enfin, les hommes politiques redécouvriraient peut-être que leur rôle consiste aussi à imaginer un Avenir optimiste et à l’exprimer. Attendre qu’une NASA étrillée depuis 35 ans, sorte de son chapeau un programme spatial humain « faster et cheaper » qui serait adopté ou non selon l’étude des sondages sur une population que l’on a réduit intellectuellement au « cocoonning » et à la consommation tient de la fiction. Un autre écueil à éviter est celui du risque zéro, il n’existe nulle part ni dans le secteur automobile ni en aviation, encore moins avec le spatial : chercher à l’appliquer aux navettes restantes les rendra encore plus inexploitables. Un dosage équilibré doit être trouvé entre les nécessités opérationnelles, une modernisation et une maîtrise des budgets afin d’assurer une exploitation humaine sûre. Le projet d’une station spatiale fut lancé en 1984, le premier élément atteint l’orbite basse fin 1999. Après bien des vicissitudes, continuellement vilipendée par les média, son seul et dernier rôle se réduit maintenant à permettre de dénicher un « produit miracle », au sens néo libéral du mot, afin de se justifier. A sa genèse, résultant d’une gestion calamiteuse du programme, s’ajoutent maintenant les séquelles de l’accident de Columbia, soit un arrêt de la construction et un ralentissement de l’activité ultime concédée : actuellement 2 opérateurs astronautes font « au moins » dix heures des manipulations scientifiques par semaine !!! Ces tristes constations n’enlèvent rien aux missions d’une station spatiale, et les responsables de cette gabegie sont à rechercher plutôt du côté des hommes politiques américains que de celui de la NASA, cette dernière n’étant somme toute qu’une agence gouvernementale ballottée au gré des vents. Dans l’hypothèse d’ambitions spatiales humaines, les missions de cette infrastructure demeurent celles : d’une école d’apprentissage de l’espace à quelques minutes du sol de la planète, d’un centre d’entraînement, d’un lieu d’essai pour des systèmes spatiaux, d’une université de l’espace pour tous les domaines scientifiques et techniques, et d’un « port » ou point de liaison situé aux confins de deux milieux différents. Le temps passé pour traverser l’atmosphère et la propulsion dans ce milieu entraînent des engins utilisant des concepts et des technologies dissemblables de ceux exploités dans le vide spatial. Bien sûr nous pouvons aller sur la Lune ou sur Mars directement, mais dans le cas d’une civilisation demandant autre chose à l’espace que des analyses afin de savoir si la vie extraterrestre existe ou de poser quelques scientifiques sur un astre pour quelques recherches, une ou des stations spatiales bien conçues permettront une réelle souplesse dans la création de nouvelles sphères d’activités. Si les notions d’infrastructure portuaire, de banc d’essai, d’école d’expérimentation et d’application ne sont plus guère évoquées à propos de la station - et pour cause elles furent supprimées en 1993 lors d’une des nombreuses restructurations du projet – celle de centre scientifique est continuellement sous le feu des critiques. Ces dernières ne s’adressent généralement pas aux recherches concernant l’humain, car chacun sait que la NASA n’ayant aucun programme habité officiellement autorisé, au delà de l’ISS, ses travaux restent théoriquement sans conséquences. Par contre les autres Sciences : Physique, chimie, cristallographie etc. susceptibles de déboucher sur des applications inconnues subissent une opposition régulière et trois reproches reviennent régulièrement : • -« Il n’y aurait rien à trouver là-haut ». Cet argument ressemble par certains aspects à celui que l’on pouvait entendre à la fin du XIXe siècle où des hommes éminents prédisaient la fin des Sciences, puisqu’à quelques exceptions près tout était pratiquement découvert ! Pourtant, comment ce peut-il qu’en modifiant le paramètre g de toutes les équations de la Physique et autres, rien ne change ? Comment en allant dans le vide le plus profond, dans les températures les plus extrêmes, sous les radiations les plus fortes, il n’y ait rien à trouver ? • -« C’est trop cher, nous n’en avons plus les moyens » L’argument est fallacieux car l’argent existe, ce sont les choix et les règles économiques qui ont changé. Le projet de station spatiale avec ses budgets continuellement rognés depuis 1984 aboutit avec l’ISS à une infrastructure diminuée quant à ses capacités d’être un laboratoire de recherche adéquat. L’Agence Spatiale Américaine dans cette ambiance économique, où le « la réduction des coûts » prime sur tout, n’a pas les coudées franches pour faire de la Science sereine : il lui serait de bon ton de sortir quelques produits miracles et bien médiatiques de ce « Titanic financier » ! Ces contraintes financières entraînent des conséquences comme celles allant de la prétention que des systèmes automatiques feraient beaucoup mieux (ce qui est vrai dans le cas de productions, mais alors ne parlons pas de Science), à l’utilisation d’astronautes comme manipulateurs selon des protocoles très serrés grâce à la télé-opération. Ces entraves imposées par des lois financières irrationnelles en raison de profits non-immédiats - alors que dans d’autres pans de l’économie c’est l’exubérance – induisent également une concurrence néfaste entre les budgets exsangues alloués au spatial. Les scientifiques travaillant sur des projets liés à des systèmes automatiques craignant que leurs dotations ne soient diminuées en faveur des vols habités adoptent des comportements négatifs vis-à-vis de ces derniers, alors que la complémentarité devraient être la règle. •
-« Il n’y a aucune demande », les espoirs des
années 1980 pour les produits spatiaux se sont effondrés.
Non ! Répétons-le, nous nous sommes enfoncés encore
un peu plus dans des concepts financiers privilégiant le profit
le plus rapide, et cette logique disposant de relais médiatiques
efficaces décréta que toute cette affaire n’était
que mythe. Actuellement la microgravité, qu’elle soit obtenue
dans des tours, des avions ou sur l’ISS est utilisée par
quelques laboratoires pour comprendre l’implication de la gravité
sur certains produits susceptibles d’avoir un marché ou un
impact médiatique, mais là encore nous ne pouvons pas qualifier
cela de Science. Cette dernière se trouve bien au delà de
recherches faites dans un but commercial. Le processus doit être
inversé, faisons de la Science en orbite basse, entraînons
les hommes pour aller plus loin, développons les machines qui nous
permettront de soutenir une base sur la Lune et de voyager vers Mars,
alors le vrai business de l’espace viendra, en son temps. Peu de
gens sont capables d’imaginer ce que serait la Science, l’Economie,
les moyens, les produits d’une Société ayant accepté
d’essaimer dans le Système Solaire en utilisant pleinement
ses capacités au progrès. (Comme en 1803 il était
impossible d’imaginer la Science, l’Economie, les moyens,
les produits réalisés en 2003 suite à 170 ans de
développement scientifique et technique dynamique). Le Mythe ne
serait-il pas plutôt du côté d’une « Main
Invisible », envahissante et prétendant offrir un avenir
prêt-à-porter à l’Humanité ? •
Cette station spatiale est maintenant bien avancée, comme la Navette
elle n’est pas parfaite, les erreurs, nous l’avons dit, en
incombent à ceux qui dirigèrent successivement au plus haut
niveau de l’Etat ces programmes. La Navette est un problème
américain, la Station est un problème international concernant
l’Europe. Le rôle de cette première infrastructure
en orbite basse n’est pas de fournir des retours rapides sur investissements
ou des profits ; Elle doit être traitée comme une zone industrielle
pour les parties portuaires doublée d’un parc de recherche
et d’une université en miniature pour l’aspect technique
et scientifique, peu importe si ses fonctions sont séparées
en orbite pour des raisons d’incompatibilité. C’est
à la Communauté, si elle espère un avenir décent,
donc au travers des Etats, d’inciter au financement pour la construction
de cette infrastructure, d’organiser à son accès régulier,
et d’y assurer des conditions de vie basiques à bord ; c’est
aux entreprises privées de réaliser cet ensemble. Rien n’interdit
un trafic ou la construction de modules privés. Aux Scientifiques,
aux techniciens, aux étudiants, aux hommes des entreprises de monter
là-haut à des coûts intéressants afin d’étudier,
de découvrir et d’exploiter les potentiels offerts. Pour
devenir tout cela cette ISS doit être terminée, agrandie
et vivre. L’Europe a ici une opportunité fabuleuse de mettre
le pied à l’étrier : le cargo existe, le lanceur est
là, il faut le rendre « man rated », l’engin
qui le coiffera sera sûrement plus délicat à cerner,
(il doit être simple et réalisé rapidement, ce ne
sera qu’un véhicule de transition), la construction de modules
habitables ne présente pas de problème à l’Europe.
En ce qui concerne l’argent l’affaire est réaliste,
un coup d’œil aux réactions créatives et positives
en matière de financement à l’annonce des «
Cinquante grands projets pour les régions françaises
» dans le Figaro Economie du 19 décembre 2003 montre que
des solutions existent. Le plus dur à résoudre reste à
trouver les hommes politique pour saisir l’opportunité ! |
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Trois articles récents ont attiré l’attention de la National Space Society France :
Le
second article : « L’espace commercial est-il un marché
? » signé par Laurent de Angelis, beaucoup plus sérieux,
est paru dans la revue Espace Magazine de Janvier / février
2004. Ce papier pose une véritable question, et les conclusions
sont pertinentes. NSS France se permet quelques réflexions lui
venant à l’esprit. L’aspect commercial d’une
politique spatiale ne peut se résumer à une question de
souveraineté et d’indépendance, il doit s’inscrire
comme conséquence d’un projet de société beaucoup
plus large, étayé par la Raison et animé par l’objectif
d’offrir à chacun un avenir décent. Dans le potentiel
d’activités à développer pour relever le défi
d’une grande Initiative Spatiale Européenne, de nombreux
problèmes de société et économiques se verront
atténués. La résolution du problème de l’homme
dans l’espace (nous savons que ce n’est pas le thème
de l’article) passe par une réponse à cette question
philosophique : quel avenir pour nos sociétés dans le futur
? Vouloir le réduire ce travail intellectuel à des justifications
empiriques au profit de la science, du tourisme spatial, du prestige,
de la souveraineté ou du commerce conduit à l’impasse,
surtout dans le type d’économie financière mis en
place au niveau mondial depuis quelques années. Si l’Europe
est capable d’objectifs spatiaux ambitieux soutenus par des budgets
cohérents afin d’ouvrir de nouvelles sphères d’activités,
souveraineté, indépendance, géopolitique viendront
d’eux-mêmes. Faire « comme les Etats-Unis, ce qui rapporte,
en plus petit » parce que c’est dans l’air du temps
: des satellites militaires d’observation, de télécom.,
environnemental, de navigation, et un peu de science « branchée
» avec des sondes automatiques ou éventuellement par «
manipulateur-spationaute » interposé (quand les américains
l’autoriseront) dans l’ISS, relativisent complètement
ces vœux politique pieux. Entendons-nous bien, nous ne sommes pas
contre ces « copies », elles doivent être réalisées,
mais ce sont des applications basiques que l’Europe devrait avoir
réalisées depuis 20 ans, si nos responsables politiques
avaient eu une véritable politique industrielle et commerciale.
Elles ne peuvent se substituer à un grand programme spatial humain
générateur de progrès et d’une véritable
nouvelle sphère économique. Enfin
nous terminerons avec un article du mensuel Ciel & Espace
de Janvier 2004 intitulé : « Les projets de la NASA et
de l’ESA : la station spatiale et l’espace au service du citoyen
». Monsieur Jean François Haït y conduit un entretien
avec les dirigeants des deux agences spatiales. Dans la partie consacrée
à monsieur Jean Jacques Dordain directeur de l’ESA nous avons
relevé une de ces phrases qui montre que nous sommes encore loin
de notre but. |
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Peut-on
se proclamer athée par les temps qui courent ? Ce « a »
privatif offusque le bon sens comme un défaut de liberté.
Appliqué à un domaine qui fait une aussi grande place à
l’interrogation, il a quelque chose d’indécent. Maintenant
que le ciel –le ciel physique- est ouvert à nos investigations
dorénavant sans limites, ce « a » coupe court à
tout questionnement constructif. Or il est évident que les milliers
de générations qui vont nous succéder dans le domaine
de l’espace enrichiront notre savoir positif. A la lumière
des découvertes et confrontations qui nous attendent, de labos
en labos et de corps célestes en corps célestes, l’agnosticisme
est promis à des rebondissements innombrables. Entre la réalité
globale et la connaissance répertoriée, la limite s’amenuise
de jour en jour. A l’échelle de l’univers, tout n’est
qu’évolution sous les formes les plus diverses, tout n’est
que mouvement. Tel jugement établi en un matin naissant tourne
au préjugé avant que le jour ne s’achève.
Nous autres, laïques occidentaux – à l’encontre des orientaux tardivement soumis à des modes de pensée intangibles – avons mis près de deux siècles pour nous libérer des entraves contrôlées par l’autorité religieuse, et cela a fait de nous, en ce début de millénaire, des partenaires à la fois vigilants et tolérants : vigilants pour affermir la laïcité conquise de haute lutte par les générations qui nous ont précédés, tolérants à l’égard de tous les théocrates de notre temps dans la stricte mesure où ils se montrent eux-mêmes respectueux de la capacité de leurs concitoyens à induire et à déduire sans référence aux dieux. Les controverses actuelles sur les signes ostentatoires d’appartenance à telle ou telle croyance illustrent assez bien la fragilité de libertés chèrement acquises. Les tentatives de reconquête sont continuelles. Elles nous viennent, depuis quelque temps, des communautés exotiques récemment implantées sur notre territoire et prennent le relais des rivalités de naguère entre le maire et le curé de la tradition. Accorder à ces influences d’arrière-garde la concession d’un voile sur un visage adolescent pourrait conduire aux plus fâcheuses dérives. Le fanatisme est le produit d’une passion. Sa virulence a éventuellement le pouvoir de nous réduire, par lassitude, aux pires abandons. La caravane passe ; et il n’apparaît aucunement inconvenant, en ce début de siècle, d’inviter le caravanier encore enlisé dans ses contradictions culturelles à faire un effort pour sortir de l’ornière comme nous l’avons fait nous-mêmes il y a quelques décennies. A cet égard, faisons confiance aux jeunes garçons et surtout aux jeunes filles des générations montantes qui, elles aussi, aspirent à la responsabilité. Peut-on se proclamer athée ? La question revient en boucle, car tout ici est étroitement lié. Depuis que nous possédons la clé de l’espace, depuis que nous avons vaincu l’enfermement, la conquête de nouvelles sphères est émancipatrice. Et ce, pour la simple raison qu’un tel engagement est irréversible : il est l’aboutissement d’une dynamique biologique et culturelle couvrant des milliers de milliers de millénaires. En aucun cas un cheminement de cette nature ne peut déboucher sur une impasse. « Le rêve spatial tourne en rond », dit-on. Voilà qui serait plutôt conjoncturel et provisoire. La modération des assoupis qui vivent dans la crainte d’aliéner un privilège passager ne saurait entraver une telle entreprise. L’espace ? Plus que jamais ! Sans doute est-il vain de nier que la plupart des agences spatiales connaissent des difficultés, mais les bases de lancement sont encore prêtes à assumer un lendemain à la prodigieuse aventure. Au regard des modes de propulsion en cours d’étude et dont la mise au point ne saurait excéder quelques décennies (propulsions héliothermique, électromagnétique, nucléaire, laser par ablation, photonique, dispositif par câble à gradient de gravité avec effet de fronde, par tel autre câble électrodynamique utilisant le champ magnétique terrestre ou quelque autre mode de même venue) les ergols utilisés jusqu’à ce jour seront considérés comme archaïques. Dans les heures que nous vivons, balisées d’ornières et de dégradations, tous nos efforts doivent tendre à sauvegarder l’acquis, à éviter le dépérissement des équipes du génie spatial qui fonctionnent en cinq ou six points de notre planète, et ce avec un mobile précis : établir des ancrages dans notre nouveau domaine, consolider notre récente émancipation, prendre délibérément la relève du siècle des Lumières. Les rampes sont indemnes, à ciel ouvert. L’essentiel est encore en fonction : Dieu merci, trois sondes sont au contact de la planète rouge. Et pourtant, il y a péril. La politique spatiale européenne entre en déclin dès lors que, faute de moyens, ses agences nationales doivent renoncer à développer la recherche de nouvelles technologies. Les budgets actuellement consacrés à cette fin par l’autorité bruxelloise sont réduits à quelques milliards d’euros pour satisfaire des besoins multiples ; or il est établi qu’un euro investi dans le spatial induit une dizaine d’euros de chiffre d’affaire dans les services à valeur ajoutée. Si les budgets s’égarent, si nous laissons les équipes se désagréger, si nos grands ouvreurs de trajectoires, faute de moyens, se tournent, n’en pouvant mais, vers d’autres activités, il nous faudra plusieurs décennies pour tout remettre à flot. La NASA et ses dépendances, ainsi que la NASDA, les agences nationales de l’Europe, de la Russie, de l’Inde et de la Chine risquent de pâtir d’un désengagement passager. Face aux contradictions qui opposent, au cours de la période-charnière que nous traversons, les partisans d’un libéralisme extrême à leurs contestataires souvent allergiques à la responsabilité, l’espace est sans doute, du fait de sa nature, le moyen le plus efficace pour concrétiser un grand projet humaniste et sortir du piège dans lequel nous sommes en train de nous enliser. Pour l’heure, ce qui semble être en défaut, c’est notre capacité d’entendement global d’une dynamique, c’est notre égarement, face à l’impérieuse nécessité de relever le défi, de prolonger l’effort. A ne point s’y tromper, ce début de millénaire se présente sous le jour d’une période privilégiée de la nature de celles qui orientent l’histoire et qui débouchent sur des préludes irréversibles - ou, à défaut d’hommes de veille, sur des échecs sans retour. Jamais, sans doute, le fossé n’aura été aussi infranchissable entre les dogmes englués dans le passé et notre rapport à l’Univers tel qu’il nous est offert. Les tenants de ce qui fut et n’est plus se cramponnent à leurs patrimoines matériels et spirituels avec l’énergie du désespoir. Cela leur vient du fin fond de leur conformisme. A l’opposé, les centres de recherche et laboratoires de notre temps nous donnent accès à des ouvertures tout à fait réjouissantes dans de nombreux domaines - non sans quelques déviances, il est vrai, orientées vers des produits hasardeux, inquiétants, scabreux, au chapitre des sciences de la vie. Quand la monture s’emballe, une main experte s’impose sur le bridon. Pour nous éviter bévues et égarements, nous serions sans doute bien inspirés de remettre en usage les enseignements conjoints des classes de science et de philosophie tels qu’ils étaient dispensés sous notre troisième République et d’y admettre des jeunes gens de toutes traditions. Hélas, pour l’heure, nous sommes encore fort éloignés d’une telle mesure. La misère sévit sous toutes les latitudes. Elle est le produit de réflexes premiers : autolâtrie des nantis et fanatisme des foules. Mais à l’évidence, tous les jours, notre bonne Terre fait un tour sur elle-même - constat élémentaire - et, ce faisant, génère des éléments de renouveau. Tous les blocages cèderont comme ils ont cédé dans le passé. Les dynamiques jumelles de l’économie et du social trouveront inévitablement remède aux dysfonctionnements qui nous accablent, et ce, à la mesure même des moyens industriels que nous sommes appelés à mettre en œuvre pour persévérer dans nos entreprises spatiales. Les budgets sont considérables ? Soit ! De même seront les retombées que nous sommes en droit d’attendre d’un effort d’une telle ampleur. Parmi les altermondialistes et autres multilatéralistes de ce monde, il en fut pour ouvrir la voie, il en est encore, en nombre croissant, qui voient et imaginent au-delà des barrières engendrées par les égoïsmes et les intégrismes avec lesquels nous sommes actuellement confrontés. Ils vont même, à brève échéance, se libérer de l’immodestie nationaliste, risquer un œil à la verticale et nous rejoindre sur nos trajectoires connexes. Nous les y attendons de pied ferme. Georges
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